Votre nouvel album sort le 27 janvier
2014. Vous pouvez nous en dire plus ?
Michel Cloup : C'est à dire ?
(rires) Qu'est-ce que tu veux qu'on dise ?
Eh bien tout, il s'appelle comment
déjà ?
M-C : Il s'appelle Minuit dans
tes bras, c'est un album avec sept chansons dont certaines très
longues. C'est un peu une continuité de notre silence tout en étant
quand même un petit peu différent. Il est moins intimiste, un peu
plus rock et plus bruyant. C'est un peu le résultat de deux ans de
tournées. À l'époque,
quand on a écrit Notre Silence, on ne jouait pas encore,
c'était vraiment les débuts du projet. Donc c'était un album qui a
été écrit et une fois qu'il a été écrit, on a fait des
concerts. Après ces deux ans de concerts, on avait envie de revenir
à quelque-chose d'un peu plus rock. C'est un disque qui part dans
plein de directions différentes et c'est un peu un développement de
ce qu'on avait jeté comme base dans Notre silence. On est allé plus
loin dans certaines options qu'on avait prises, on a creusé un peu
plus. À la fois sur le
côté chanson, il y a des titres très chanson, beaucoup plus que
sur notre silence. Et il y a des morceaux, au contraire, très rock,
beaucoup plus furieux. Il y a un morceau très long qui s'appelle
« Minuit dans tes bras » qui est un peu dans la
continuité du morceau « Notre silence » mais qui est
aussi très différent.
Patrice Cartier : La scène a
beaucoup influencé le disque. On a trouvé une nouvelle énergie et
le premier disque a aussi pris une autre tournure sur scène. Donc
c'est un aboutissement au niveau de l'énergie, beaucoup plus rock.
Est-ce qu'il y avait dès le début
l'envie d'une continuité, le projet d'avoir une suite ?
M-C : Pour moi oui, mais le projet
a été construit bizarrement, c'est à dire qu'au départ, j'ai
commencé à travailler seul parce que j'avais l'opportunité de
faire un concert seul. On m'a proposé un concert et je ne savais pas
trop ce que j'allai faire. À
ce moment là, je recommençais à faire des chansons et j'ai
contacté Patrice. On était les deux seuls d'Expérience et de
Binary Audio Misfits à être sur Toulouse. On avait déjà fait un
concert juste tous les deux en duo et naturellement j'ai appelé
Patrice pour qu'on essaye de voir ce qu'on pouvait faire. On a donc
mis en place un concert en quelques jours avec des nouveaux titres.
Quelque-chose d'un peu fragile. Après on a commencé à travailler
sur le disque, à tourner, et on a commencé à bien aimer ce projet
en duo. L'album est sorti, l'accueil a été bon et on a beaucoup,
beaucoup tourné, pendant plus de deux ans. Donc ça continue sous
cette forme là, même si au départ on ne savait pas forcément où
on allait. Au départ, j'ai commencé seul et le premier EP
s'appelait Michel Cloup parce que c'était plutôt un truc
solo et au fur et à mesure, avec Notre Silence et tout ce qui
a suivi derrière, on est parti sur cette formule duo.
P-C : Il y avait quelque-chose
d'excitant, c'est qu'on était tous les deux devenus des machines
avec Expérience, on faisait des concerts, on n'arrêtait pas, on
était assez sûr de nous et là ça faisait un peu peur de se
retrouver seuls tous les deux sur scène. On avait peur mais c'était
assez excitant.
M-C : De se retrouver sur le fil,
juste à deux, on a trouvé une sorte de musicalité qu'on avait pas
dans des projets où il y avait plus de gens. En se retrouvant à
deux, y avait une vraie liberté d'interprétation des morceaux. Il y
avait vraiment quelque-chose qui nous a rapproché musicalement, qui
était très excitant et qu'on n'avait pas vraiment connu avant.
Parce que, forcément, sur une formule avec plus de musiciens, il y a
toujours plus de contraintes. Alors qu'à deux, juste une guitare et
une batterie, il y a une grande liberté. Ça a été comme un
nouveau départ, on est repartis de zéro. Ça faisait quand même
dix ans qu'on jouait ensemble avec Expérience et BAM! Et ça a été
un peu comme un nouveau départ même dans notre façon de faire de
la musique. Après le futur, on verra. L'idée que j'avais au départ
c'était de ne pas avoir de contrainte de groupe, d'être obligé. On
est deux, si l'un de nous en a marre il peut arrêter. Ensuite,
peut-être que si on finit par sentir qu'on a fait le tour de cette
formule à deux, peut-être qu'on jouera avec une troisième
personne. On veut se laisser la liberté d'évoluer comme on en a
envie mais pas de se faire enfermer dans un groupe.
P-C : Faut que ça reste simple.
Vous parliez de la tournée, qui a été
super longue, presque sur deux ans je crois.
M-C : Oui, même plus parce qu'on
avait fait une vingtaine de concerts avant la sortie de l'album.
Le fait que cette tournée ait tant
duré et que les retours ait été si bons, est-ce qu'au moment de
penser à Minuit dans tes bras ça a été facteur de
pression ?
M-C : Oui et non. Non parce qu'on
avait déjà commencé à écrire juste après la sortie du premier
album.
P-C : Une fois qu'on l'a mis en
boite, on a eu des doutes.
M-C : Y a eu des doutes, de la
pression parce que le premier avait été vachement bien accueilli et
qu'on avait pas envie de resservir la même soupe et de refaire
exactement la même chose. Quand on part sur quelque-chose de
différent on a toujours des doutes. Y avait moins de doutes pour le
premier.
P-C : Y avait pas d'enjeu pour le
premier. Le deuxième c'est toujours un peu dur de se ramasser si
jamais on te rabâche que le premier était mieux. C'est toujours un
peu angoissant. Mais tant qu'on s'amuse sur scène, finalement on ne
s'inquiète pas trop.
Le premier était autoproduit et Minuit
dans tes bras sort sur Ici d'ailleurs, comment s'est fait la
connexion ?
M-C : J'étais en contact avec Ici
d'ailleurs pour la distribution de Notre Silence,
je passais par eux pour avoir une distribution chez Differ-ant. De
fil en aiguille, juste avant d'enregistrer Minuit dans tes
bras, on s'est demandé si on
recommencé en auto-édition ou si on essayé de trouver un
partenaire. Sur Notre Silence
il y avait juste un tourneur qui nous trouvait des concerts et un
distributeur pour le disque mais pas du tout de label derrière. Là,
Pascal de Mendelson m'a annoncé qu'ils allaient travailler avec Ici
d'ailleurs et j'ai parlé à Stéphane du label de l'idée de
s'associer à eux pour cette sortie. On s'est appelé plusieurs fois,
moi j'étais très retissant sur l'idée de retravailler avec un
label parce qu'on a eu beaucoup de déconvenues après la fermeture
de Lithium, avec certains gens avec lesquels on a travaillé après,
pas tous mais certains. J'étais un peu frileux, surtout que pour le
premier ça s'était plutôt bien passé, ça avait été une sorte
de victoire. En discutant avec Stéphane, on est parti sur une
manière de travailler qui n'était pas une manière traditionnelle
de label, même en termes financiers on ne travaille pas comme moi
j'ai travaillé par le passé avec des labels. Ici d'ailleurs existe
depuis la fin des années 90 donc on a un peu commencé au même
moment, on en est un peu au même âge. Quand on s'est parlé on
s'est compris. La communication a été facile et j'ai tout de suite
senti que ce n'était pas quelqu'un qui essayait de me jouer un tour
de flûte et de me faire croire n'importe quoi. Il avait envie de
sortir le disque, avec toutes les réserves qu'on peut avoir
aujourd'hui sur le fait de sortir un disque. Il avait un discourt
assez passionné mais sensé qui m'a bien plus. Pour l'instant ça se
passe plutôt très bien.
Comment est venue
l'idée de sortir les deux 45t avant l'album ?
M-C :
L'idée est qu'on savait déjà plus ou moins ce qu'on allait
enregistrer. Je voulais donner une ligne à l'album au niveau des
textes. On avait deux titres en plus qui d'après moi ne pouvaient
pas figurer sur l'album. Ils n'étaient pas forcément raccords avec
le reste du disque mais on avait envie de les garder. Donc à un
moment, je ne sais pas, je me suis dit que ça pourrait être drôle
de sortir deux 45t et d'enchainer sur l'album. Au départ, quand on
en avait parlé avec Patrice, on voulait sortir un 45t, l'album puis
un deuxième 45t. Au même moment, j'ai vu les peinture qu'on a
utilisé en pochettes et on s'est dit que ça pourrait être génial,
en plus de l'idée d'avoir les deux singles, d'avoir ce truc un peu
raccord et que chaque peinture colle soit aux deux chansons des
singles, soit à l'ambiance de l'album. Ça donnait donc une sorte de
triptyque, chacun était un peu différent mais les trois
fonctionnaient avec chaque format, chaque disque et chaque chanson.
J'en ai parlé avec le label qui a trouvé l'idée bonne et on l'a
fait. Tout simplement !
Il y a aussi deux
clips pour chacun des singles. Ils ont été réalisés par Béatrice
Utrilla, avec laquelle tu travailles assez souvent.
M-C : J'ai
rencontré Béatrice dans les années 90, à l'époque de Diabologum.
J'étais tombé sur des photos à elle dans un catalogue d'une de ses
expos, on cherchait des photos pour la pochette du numéro 3. J'ai
beaucoup aimé son boulot, c'était une amie d'une amie. On a sorti
l'album de Diabologum et on est resté en contact, on est devenu très
proches. J'ai fait beaucoup de sons et de textes pour ses images. On
a travaillé sur des films, sur des installations, tout un tas de
choses différentes depuis la fin des années 90. Aujourd'hui, dans
nos boulots respectifs il y a un truc qui fait écho. On aime
beaucoup travailler ensemble parce que c'est hyper simple. On n'a pas
besoin de beaucoup discuter pour arriver à bien travailler. Elle
avait déjà fait des choses pour nous, elle avait fait une pochette
pour Expérience. On lui a proposé de travailler sur ces clips.
J'aime bien l'idée de collaboration qui s'étale sur le temps.
J'aime bien les choses qui durent et qui se développent. J'aime
aussi les collaborations passagères mais vraiment j'aime l'idée de
travailler avec des gens à un certain moment et de continuer ça sur
le long terme même si ce n'est pas un projet principal. On va faire
quatre soirées avec des invités pour la sortie de l'album et
Béatrice fera partie de ces invités. Elle va nous faire une
projection, un truc un peu particulier pour les concerts.
J'allai demander si
c'était prévu qu'il y ait des images sur scène.
M-C : ça ne
sera pas systématique, ce sera ponctuel pour quatre concerts où il
y aura d'autres invités. Mais c'est vrai qu'on n'a pas forcément
envie de travailler avec des images, au contraire. On a vraiment
envie de se focaliser sur le live, parce qu'on joue vraiment
beaucoup, il y a une interactivité entre nous.
P-C : Il faut
que ça reste brut.
M-C : On a
envie que les concerts en duo restent quelque-chose d'assez brut et
d'assez vivant.
P-C : C'est
vachement plus difficile de faire focus essentiellement sur la
musique sans la lumière, la vidéo. C'est un truc qu'on a déjà
exploité dans Expérience.
M-C : On
faisait ça dans Expérience en 2001-2002, on fait beaucoup de
concerts avec de la vidéo. On a arrêté parce qu'on avait
l'impression que les gens regardaient la télé. Je trouve que la
vidéo c'est bien quand tu dois habiller une performance. Avec
Béatrice, on fait des performances depuis l'an dernier sur ses
images, j'ai incorporé une musique que je joue en live et elle
manipule des séquences, c'est vraiment focalisé sur l'image. Mais
je trouve que pour un groupe de rock, c'est souvent un piège. On a arrêté de le faire avec Expérience parce que les gens ne
regardaient pas ce qui se passait sur scène. Pour le coup, il se
passait des choses sur scènes.
P-C :
Et notre attitude a changé aussi. On est plus en communication avec
les gens. C'est vrai que c'est assez frustrant de jouer et de voir
les gens qui regardent derrière. Là, c'est bien quand il y a une
confrontation directe.
C'est vrai, je vous
ai déjà vu deux fois sur scène, qu'on ressent l'interaction qu'il
y a entre vous deux.
M-C : Le
problème des images, tu le vois quand tu invites des gens chez toi,
si on fait une fête avec des gens et qu'on allume la télé, plus
personne ne va discuter et tout le monde va regarder la télé. Même
si il n'y a pas le son, les gens vont regarder l'image. Tu vois dans
les bars, les gens boivent des coups et si il y a une télé
allumée, les gens la regardent. Ils ne parlent plus, ils regardent
la télé. Les concerts c'était un peu devenu ça et ce n'était pas
très excitant. Le projet avec Béatrice, ça ne va pas être un
robinet à images, il va y avoir des images de temps en temps mais il
va y avoir une manière d'amener les images.
P-C : C'est
aussi un autre contexte. C'est pas un concert de rock.
M-C : Oui, et
sur les concerts duo on préfère le côté très rock et même ne
pas avoir forcément beaucoup de lumières.
Il y a aussi, une
nouvelle fois, une participation de Françoise Lebrun, est-ce que
c'est encore un extrait de film ou un texte écrit pour le morceau ?
M-C : C'est un
texte écrit pour le morceau. Quand on a fait le concert de
reformation avec Diabologum, Françoise nous a contacté une semaine
avant pour nous rencontrer, via un ami commun, et éventuellement
faire quelque-chose avec nous sur scène. On n'y croyait pas
beaucoup. Finalement, on s'est rencontré, on a fait ce truc là qui
s'est fait la veille avec juste une seule répétition, c'était très
spontané. Ça a été assez bouleversant, c'était le concert de
reformation de Diabologum plus Françoise Lebrun qui arrive en vrai à
la fin. Pour être honnête, c'était vraiment bouleversant. Ça
s'est un peu passé comme avec Béatrice Utrilla, je suis resté en
contact avec Françoise. On s'est revu plusieurs fois, on a fait une
intervention dans un cinéma pour présenter La Maman et la putain
et parler aussi du rapport entre le morceau de Diabologum et le film.
Au moment du nouvel album, comme le rapprochement s'était toujours
fait au travers de La Maman et la putain, pendant quinze ans
les gens parlaient de Diabologum à Françoise et nous on nous
parlait du film. Je me suis dit, voilà, on est devenu amis, je sais
que Françoise ce n'est pas juste ce film-là, nous non plus
d'ailleurs mais dans l'esprit de plein de gens c'est ça. J'ai eu
cette idée, je n'osais pas trop au début, je flippais quand même
un peu. Parce qu'inviter Françoise, écrire un texte, la faire
intervenir sur un texte, après La Maman et la putain, c'était
un peu casse-gueule (rires). J'ai écrit un texte et je lui ai envoyé
en lui proposant de participer et elle a été enchantée et ravie.
Elle a fait sa prise voix à distance. Et, c'est un peu comme quand
on travaille avec Béatrice ou comme quand on a bossé avec Pascal de
Mendelson, ce sont des choses qui coulent de source. Je n'ai pas eu
besoin de passer quatre heures au téléphone à expliquer à
Françoise ce qu'elle devait faire. Elle est arrivée, on était même
pas là à l'enregistrement, c'est un copain qui a enregistré sa
voix, elle a écouté une fois la musique, a demandé qu'il la coupe
et elle a enregistré sans la musique. Le pote m'a envoyé la piste
voix et en studio j'ai dit « tiens, c'est là que ça rentre »,
j’appuie sur le bouton, on a enregistré la piste depuis
l'ordinateur vers le magnéto à bandes et c'était juste génial !
Oui, pour l'avoir
écouté, ce morceau est vraiment incroyable.
M-C : Oui,
c'est un chouette morceau et à la fin, sa voix, c'est magnifique.
Donc au final, c'était une grosse trouille mais en fait c'était
cool ! (rires)
P-C : C'est un
morceau assez particulier. Pendant l'enregistrement, il y a un truc
qui est sorti comme ça, un peu de nulle-part.
M-C : C'est
parce qu'au début, c'est des bouts de morceaux, des choses que
j'avais à la guitare, d'autres qu'on avait joué et ça s'est mis en
place une semaine avant l'enregistrement. On l'a pas vraiment mis en
place, on l'a joué un peu comme des jazzmen. On l'a un peu répété,
on a fait qu'une seule prise en studio, y a aucun overdub, tout est
joué live. C'est le seul morceau de l'album qui est comme ça.
C'était pourtant le morceau qu'on avait le moins répété et qui
était le moins écrit. C'était assez incroyable.
D'ailleurs, est-ce
qu'il y a une différence dans votre travail commun dans la
préparation de cet album par rapport au précédent ?
M-C : C'était
un peu pareil.
P-C : Disons
que là on avait deux ans de tournée ensemble dans les pattes.
M-C : On avait
plus joué ensemble.
P-C :
Musicalement, on se connaît très très bien. Ça fait quand même
un petit moment qu'on joue ensemble. L'écriture était différente
parce que l'histoire qui est raconté est complètement différente.
Moi je me sens plus impliqué là qu'il y a deux ans. Ça fait partie
d'une autre histoire, de trucs beaucoup plus personnels auxquels j'ai
assisté. C'est une question que je ne pose pas vraiment, quand tu
joues avec quelqu'un, ça ne s'exprime pas vraiment par des mots.
M-C : Mais
même à l'époque de Notre Silence, les morceaux s'étaient
mis en place ensemble. L'essentiel de l'album s'était mis en place
en trois jours, moi j'avais les textes finis, des accords et des
mélodies mais c'était pas terminé.
P-C : On avait
vraiment la même envie au même moment et ça s'est vraiment fait
simplement. C'était hyper agréable. Ça faisait un moment qu'on
traînait la patte, qu'on savait pas trop et d'un coup...
M-C : Ça a
été magique.
P-C : C'est ça
et après avec les concerts, ça a fait que monter, monter. Je pense
que toi aussi mais moi musicalement, je me suis vraiment épanoui ces
deux dernières années. Je me suis vraiment éclaté comme jamais
auparavant. Pourtant, c'est beaucoup plus simple mais le fait que ce
soit un peu épuré au niveau instrumental, le tempo qui est
vachement lent. Du coup, ça laisse le temps de respirer, de se
poser, de créer une ambiance. On ne court pas derrière la montre,
ce ne sont pas des morceaux où il y a un début et une fin, on
choisit un peu la fin si on a envie de la changer. Et ça c'est
intéressant, raconter des histoire comme ça, c'est beaucoup plus
intéressant.
M-C : Après
le nouvel album s'est vachement construis, comme on était tout le
temps en tournée, parfois on faisait déjà tourner les morceaux en
balances pour bien les répéter, les nouveaux morceaux. On ne les
jouait même pas en concert. À
un moment donné, on était un peu prisonniers de Notre Silence
parce que c'était un peu dur de jouer autre-chose et de mélanger.
D'ailleurs là sur les sets qu'on fait en ce moment, on ne met pas de
morceau du premier album. On se focalise sur le nouveau. Minuit
dans tes bras s'est peut-être un peu plus fait tous les deux
puisqu'on tournait. Dès que j'avais un riff de guitare, une bribe de
morceau, hop on travaillait ensemble et ça s'est beaucoup construis
comme ça. C'est à Rome aussi qu'on a vraiment commencé à
travailler sur l'album.
P-C : C'est là
qu'on a senti le tournant par rapport au premier album.
M-C : On est
partis à Rome pour faire un résidence, on devait travailler une
semaine à la villa Médicis avec un musicien italien. Finalement, ça
ne s'est pas fait parce qu'il était malade. Il rentrait de tournée
et il est tombé malade. Donc, on s'est retrouvé une semaine à la
villa Médicis dans une espèce d'ambiance de chapelle. On s'est donc
dit qu'on pouvait bosser pour nous. Il n'y avait pas vraiment de
morceaux terminés à la fin de la semaine mais tout s'est joué là,
est sorti de là. La version longue du morceau « Minuit dans
tes bras » c'est un truc que j'avais enregistré à Rome. On
l'avait bossé à deux là-bas mais j'avais aussi fait une petite
vidéo sur internet avec ces espèces de sons et de riffs. Toutes les
bases de l'album sont arrivées là et ça a mis presque un an à se
construire petit à petit et c'est marrant parce qu'avec le recul,
tout est parti de Rome alors qu'en rentrant on avait aucun nouveau
morceau de réellement terminé. Mais on avait plein de pistes
différentes qui étaient parties de là.
Pour les textes,
est-ce qu'ils naissent avant la musique, après ou est-ce qu'il n'y a
pas de règle ?
M-C : Y a
aucune règle. Il y a parfois des riffs qui donnent naissance à un
texte, parfois ça arrive en même temps. Ça arrive aussi qu'avant
j'ai du texte, des phrases. Parfois, à partir de plusieurs textes
que j'ai écrit, j'ai juste un couplet. C'est vraiment une sorte de
cuisine qui se fait de manière hyper aléatoire, il n'y a absolument
aucune règle.
Est-ce que ça te
prend beaucoup de temps pour arriver à cette sorte d'intimité que
dégagent les textes ? Il y a ce côté autobiographique mais
pourtant aussi un peu universel qui peut toucher tout le monde.
M-C : Du
temps ? Non, généralement ce que je garde ce sont les choses
qui sont arrivées les plus vite. Les trucs super laborieux où il
faut réécrire et réécrire pour arriver à quelque-chose, en
générale ça ne donne rien. Les meilleurs trucs se font plus vite.
Après, ça peut arriver que je m'obstine sur un texte et que ça ne
marche pas alors je jette à la poubelle, je récupère des bouts,
des phrases mais en générale les choses les meilleurs sont celles
qui sont venues le plus facilement. Les trucs laborieux ça ne
débouche sur rien. Quand ça ne marche pas, ça ne marche pas.
Avant, je m'obstinais beaucoup plus. Même pour la musique, il faut
que le truc coule vite et que ça marche vite. Si il faut trop
travailler sur un morceau, même si l'idée semble bonne, c'est qu'il
y a un problème à la base. Au final, c'est beaucoup de travail pour
rien. Aujourd'hui, on a un meilleur discernement, on commence
beaucoup de trucs mais on en garde finalement pas énormément.
Pour finir, la
fatale question nostalgie. Je crois qu'il était question pendant un
moment d'une réédition du dernier album de Diabologum.
M-C : Oui,
enfin on a toujours rien fait, pour l'instant on n'en parle pas mais
un jour ça viendra. C'est sûr qu'on le fera, j'espère pas dans
quinze ans mais ça se fera. Il va falloir qu'à un moment, on se
prenne par la main et qu'on arrive à le faire.
C'est un disque qui
a une place particulière dans l'esprit de beaucoup de gens.
M-C : Oui,
mais peut-être que si on le réédite ou qu'il avait été réédité
depuis dix ans, personne n'en aurait rien à foutre ! (rires).
On se dit ça des fois. Des fois rester mythiques, c'est bien !
(rires). Ça entretient un mystère énorme !
Je regardais sur
Ebay et ça tourne autour de deux cent Euro.
M-C : Moi, ça
fait plusieurs années que j'ai envie de rééditer parce que je suis
assez scandalisé quand je vois ces prix-là et le CD à 75 Euro. Et
au final, c'est toujours les mêmes qui se font du fric et pas les
artistes et je ne pense pas qu'on se ferait de l'argent si on
rééditait ce disque, vraiment pas. Moi ça me ferait plaisir que ça
soit réédité un jour mais ça le sera. C'est vrai que la vie va
vite, il faut déjà s'occuper des projets qu'on a tous. Donc,
s'occuper des trucs d'il y a quinze ans ce n'est pas le truc le plus
existant du monde et ça met en branle un tas de choses un peu
compliqué à gérer.
Est-ce que c'est
désagréable d'avoir toujours des questions sur Diabologum ?
M-C : Non.
Mais ce qui est clair maintenant c'est qu'on ne rejouera plus jamais
ensemble. C'est clair, je le dis : on ne rejouera plus jamais
ensemble. Pour les gens qui lisent ça, on peut déjà noter que ce
n'est plus la peine de nous poser la question « est-ce que vous
allez refaire des concerts ? ». Nous ne referons plus
jamais de concert. Mais sinon, c'est plutôt agréable d'avoir sorti
un disque à un moment donné qui a marqué autant de gens et qui est
devenu une référence. Si on ne faisait rien d'autre aujourd'hui,
c'est sûr qu'on le vivrait mal. Mais vu qu'on sort des disques,
qu'on est actifs, on ne vit pas dans le passé. Entre Diabologum et
aujourd'hui, il y a eu je ne sais pas combien de groupes, de projets
et d'albums sur lesquels j'ai travaillé.
Les autres aussi.
M-C : Oui,
tout le monde.
C'est vrai aussi
que le concert de reformation dont tu parlais tout à l'heure, avec
Françoise Lebrun, j'ai seulement vu des vidéos, mais c'était
tellement incroyable.
M-C : Oui,
mais je pense qu'il vaut mieux le garder comme ça plutôt que de se
retrouver confrontés à un fonctionnement de groupe.
Pour parler du
présent, et même de l'avenir, l'album sort en janvier. Les projets
pour après ?
M-C :
Tourner ! Il y a déjà pas mal de dates de prévues. Et tout
n'est pas tombé parce que la promo de Minuit dans tes bras
commence à peine.
P-C : Encore
une année bien chargée !
Merci beaucoup !
Michel et Patrice :
Merci !