28 novembre 2014

Interview Michel Cloup Duo 21/11/2013

C'était il y a un an, et aujourd'hui alors qu'est annoncée la réédition de l'album #3 de Diabologum (pour janvier), il est bon de se souvenir que pendant presque un année Minuit dans tes bras a fait un grand bout de chemin, dans les salles de concerts et dans l'intimité de nos platines sur lesquelles il tourne encore. Un an après, c'est sûr, le deuxième album de Michel Cloup Duo est un très grand disque. de ceux qui restent et resteront. Voyage dans le temps : nous sommes le 21/11/2013, Michel Cloup et Patrice Cartier s'apprêtent à monter sur la scène du Carré Belle-feuille du festival BBmix. Ils nous parlent de l'album alors encore à venir, d'amitiés, de tournées, du plaisir de n'être que deux et du passé, mais juste un tout petit peu.

Votre nouvel album sort le 27 janvier 2014. Vous pouvez nous en dire plus ?

Michel Cloup : C'est à dire ? (rires) Qu'est-ce que tu veux qu'on dise ?

Eh bien tout, il s'appelle comment déjà ?

M-C : Il s'appelle Minuit dans tes bras, c'est un album avec sept chansons dont certaines très longues. C'est un peu une continuité de notre silence tout en étant quand même un petit peu différent. Il est moins intimiste, un peu plus rock et plus bruyant. C'est un peu le résultat de deux ans de tournées. À l'époque, quand on a écrit Notre Silence, on ne jouait pas encore, c'était vraiment les débuts du projet. Donc c'était un album qui a été écrit et une fois qu'il a été écrit, on a fait des concerts. Après ces deux ans de concerts, on avait envie de revenir à quelque-chose d'un peu plus rock. C'est un disque qui part dans plein de directions différentes et c'est un peu un développement de ce qu'on avait jeté comme base dans Notre silence. On est allé plus loin dans certaines options qu'on avait prises, on a creusé un peu plus. À la fois sur le côté chanson, il y a des titres très chanson, beaucoup plus que sur notre silence. Et il y a des morceaux, au contraire, très rock, beaucoup plus furieux. Il y a un morceau très long qui s'appelle « Minuit dans tes bras » qui est un peu dans la continuité du morceau « Notre silence » mais qui est aussi très différent.

Patrice Cartier : La scène a beaucoup influencé le disque. On a trouvé une nouvelle énergie et le premier disque a aussi pris une autre tournure sur scène. Donc c'est un aboutissement au niveau de l'énergie, beaucoup plus rock.

Est-ce qu'il y avait dès le début l'envie d'une continuité, le projet d'avoir une suite ?

M-C : Pour moi oui, mais le projet a été construit bizarrement, c'est à dire qu'au départ, j'ai commencé à travailler seul parce que j'avais l'opportunité de faire un concert seul. On m'a proposé un concert et je ne savais pas trop ce que j'allai faire. À ce moment là, je recommençais à faire des chansons et j'ai contacté Patrice. On était les deux seuls d'Expérience et de Binary Audio Misfits à être sur Toulouse. On avait déjà fait un concert juste tous les deux en duo et naturellement j'ai appelé Patrice pour qu'on essaye de voir ce qu'on pouvait faire. On a donc mis en place un concert en quelques jours avec des nouveaux titres. Quelque-chose d'un peu fragile. Après on a commencé à travailler sur le disque, à tourner, et on a commencé à bien aimer ce projet en duo. L'album est sorti, l'accueil a été bon et on a beaucoup, beaucoup tourné, pendant plus de deux ans. Donc ça continue sous cette forme là, même si au départ on ne savait pas forcément où on allait. Au départ, j'ai commencé seul et le premier EP s'appelait Michel Cloup parce que c'était plutôt un truc solo et au fur et à mesure, avec Notre Silence et tout ce qui a suivi derrière, on est parti sur cette formule duo.

P-C : Il y avait quelque-chose d'excitant, c'est qu'on était tous les deux devenus des machines avec Expérience, on faisait des concerts, on n'arrêtait pas, on était assez sûr de nous et là ça faisait un peu peur de se retrouver seuls tous les deux sur scène. On avait peur mais c'était assez excitant.

M-C : De se retrouver sur le fil, juste à deux, on a trouvé une sorte de musicalité qu'on avait pas dans des projets où il y avait plus de gens. En se retrouvant à deux, y avait une vraie liberté d'interprétation des morceaux. Il y avait vraiment quelque-chose qui nous a rapproché musicalement, qui était très excitant et qu'on n'avait pas vraiment connu avant. Parce que, forcément, sur une formule avec plus de musiciens, il y a toujours plus de contraintes. Alors qu'à deux, juste une guitare et une batterie, il y a une grande liberté. Ça a été comme un nouveau départ, on est repartis de zéro. Ça faisait quand même dix ans qu'on jouait ensemble avec Expérience et BAM! Et ça a été un peu comme un nouveau départ même dans notre façon de faire de la musique. Après le futur, on verra. L'idée que j'avais au départ c'était de ne pas avoir de contrainte de groupe, d'être obligé. On est deux, si l'un de nous en a marre il peut arrêter. Ensuite, peut-être que si on finit par sentir qu'on a fait le tour de cette formule à deux, peut-être qu'on jouera avec une troisième personne. On veut se laisser la liberté d'évoluer comme on en a envie mais pas de se faire enfermer dans un groupe.

P-C : Faut que ça reste simple.

Vous parliez de la tournée, qui a été super longue, presque sur deux ans je crois.

M-C : Oui, même plus parce qu'on avait fait une vingtaine de concerts avant la sortie de l'album.

Le fait que cette tournée ait tant duré et que les retours ait été si bons, est-ce qu'au moment de penser à Minuit dans tes bras ça a été facteur de pression ?

M-C : Oui et non. Non parce qu'on avait déjà commencé à écrire juste après la sortie du premier album.

P-C : Une fois qu'on l'a mis en boite, on a eu des doutes.

M-C : Y a eu des doutes, de la pression parce que le premier avait été vachement bien accueilli et qu'on avait pas envie de resservir la même soupe et de refaire exactement la même chose. Quand on part sur quelque-chose de différent on a toujours des doutes. Y avait moins de doutes pour le premier.

P-C : Y avait pas d'enjeu pour le premier. Le deuxième c'est toujours un peu dur de se ramasser si jamais on te rabâche que le premier était mieux. C'est toujours un peu angoissant. Mais tant qu'on s'amuse sur scène, finalement on ne s'inquiète pas trop.

Le premier était autoproduit et Minuit dans tes bras sort sur Ici d'ailleurs, comment s'est fait la connexion ?

M-C : J'étais en contact avec Ici d'ailleurs pour la distribution de Notre Silence, je passais par eux pour avoir une distribution chez Differ-ant. De fil en aiguille, juste avant d'enregistrer Minuit dans tes bras, on s'est demandé si on recommencé en auto-édition ou si on essayé de trouver un partenaire. Sur Notre Silence il y avait juste un tourneur qui nous trouvait des concerts et un distributeur pour le disque mais pas du tout de label derrière. Là, Pascal de Mendelson m'a annoncé qu'ils allaient travailler avec Ici d'ailleurs et j'ai parlé à Stéphane du label de l'idée de s'associer à eux pour cette sortie. On s'est appelé plusieurs fois, moi j'étais très retissant sur l'idée de retravailler avec un label parce qu'on a eu beaucoup de déconvenues après la fermeture de Lithium, avec certains gens avec lesquels on a travaillé après, pas tous mais certains. J'étais un peu frileux, surtout que pour le premier ça s'était plutôt bien passé, ça avait été une sorte de victoire. En discutant avec Stéphane, on est parti sur une manière de travailler qui n'était pas une manière traditionnelle de label, même en termes financiers on ne travaille pas comme moi j'ai travaillé par le passé avec des labels. Ici d'ailleurs existe depuis la fin des années 90 donc on a un peu commencé au même moment, on en est un peu au même âge. Quand on s'est parlé on s'est compris. La communication a été facile et j'ai tout de suite senti que ce n'était pas quelqu'un qui essayait de me jouer un tour de flûte et de me faire croire n'importe quoi. Il avait envie de sortir le disque, avec toutes les réserves qu'on peut avoir aujourd'hui sur le fait de sortir un disque. Il avait un discourt assez passionné mais sensé qui m'a bien plus. Pour l'instant ça se passe plutôt très bien.

Comment est venue l'idée de sortir les deux 45t avant l'album ?

M-C : L'idée est qu'on savait déjà plus ou moins ce qu'on allait enregistrer. Je voulais donner une ligne à l'album au niveau des textes. On avait deux titres en plus qui d'après moi ne pouvaient pas figurer sur l'album. Ils n'étaient pas forcément raccords avec le reste du disque mais on avait envie de les garder. Donc à un moment, je ne sais pas, je me suis dit que ça pourrait être drôle de sortir deux 45t et d'enchainer sur l'album. Au départ, quand on en avait parlé avec Patrice, on voulait sortir un 45t, l'album puis un deuxième 45t. Au même moment, j'ai vu les peinture qu'on a utilisé en pochettes et on s'est dit que ça pourrait être génial, en plus de l'idée d'avoir les deux singles, d'avoir ce truc un peu raccord et que chaque peinture colle soit aux deux chansons des singles, soit à l'ambiance de l'album. Ça donnait donc une sorte de triptyque, chacun était un peu différent mais les trois fonctionnaient avec chaque format, chaque disque et chaque chanson. J'en ai parlé avec le label qui a trouvé l'idée bonne et on l'a fait. Tout simplement !

Il y a aussi deux clips pour chacun des singles. Ils ont été réalisés par Béatrice Utrilla, avec laquelle tu travailles assez souvent.

M-C : J'ai rencontré Béatrice dans les années 90, à l'époque de Diabologum. J'étais tombé sur des photos à elle dans un catalogue d'une de ses expos, on cherchait des photos pour la pochette du numéro 3. J'ai beaucoup aimé son boulot, c'était une amie d'une amie. On a sorti l'album de Diabologum et on est resté en contact, on est devenu très proches. J'ai fait beaucoup de sons et de textes pour ses images. On a travaillé sur des films, sur des installations, tout un tas de choses différentes depuis la fin des années 90. Aujourd'hui, dans nos boulots respectifs il y a un truc qui fait écho. On aime beaucoup travailler ensemble parce que c'est hyper simple. On n'a pas besoin de beaucoup discuter pour arriver à bien travailler. Elle avait déjà fait des choses pour nous, elle avait fait une pochette pour Expérience. On lui a proposé de travailler sur ces clips. J'aime bien l'idée de collaboration qui s'étale sur le temps. J'aime bien les choses qui durent et qui se développent. J'aime aussi les collaborations passagères mais vraiment j'aime l'idée de travailler avec des gens à un certain moment et de continuer ça sur le long terme même si ce n'est pas un projet principal. On va faire quatre soirées avec des invités pour la sortie de l'album et Béatrice fera partie de ces invités. Elle va nous faire une projection, un truc un peu particulier pour les concerts.

J'allai demander si c'était prévu qu'il y ait des images sur scène.

M-C : ça ne sera pas systématique, ce sera ponctuel pour quatre concerts où il y aura d'autres invités. Mais c'est vrai qu'on n'a pas forcément envie de travailler avec des images, au contraire. On a vraiment envie de se focaliser sur le live, parce qu'on joue vraiment beaucoup, il y a une interactivité entre nous.

P-C : Il faut que ça reste brut.

M-C : On a envie que les concerts en duo restent quelque-chose d'assez brut et d'assez vivant.

P-C : C'est vachement plus difficile de faire focus essentiellement sur la musique sans la lumière, la vidéo. C'est un truc qu'on a déjà exploité dans Expérience.

M-C : On faisait ça dans Expérience en 2001-2002, on fait beaucoup de concerts avec de la vidéo. On a arrêté parce qu'on avait l'impression que les gens regardaient la télé. Je trouve que la vidéo c'est bien quand tu dois habiller une performance. Avec Béatrice, on fait des performances depuis l'an dernier sur ses images, j'ai incorporé une musique que je joue en live et elle manipule des séquences, c'est vraiment focalisé sur l'image. Mais je trouve que pour un groupe de rock, c'est souvent un piège. On a arrêté de le faire avec Expérience parce que les gens ne regardaient pas ce qui se passait sur scène. Pour le coup, il se passait des choses sur scènes.

P-C : Et notre attitude a changé aussi. On est plus en communication avec les gens. C'est vrai que c'est assez frustrant de jouer et de voir les gens qui regardent derrière. Là, c'est bien quand il y a une confrontation directe.

C'est vrai, je vous ai déjà vu deux fois sur scène, qu'on ressent l'interaction qu'il y a entre vous deux.

M-C : Le problème des images, tu le vois quand tu invites des gens chez toi, si on fait une fête avec des gens et qu'on allume la télé, plus personne ne va discuter et tout le monde va regarder la télé. Même si il n'y a pas le son, les gens vont regarder l'image. Tu vois dans les bars, les gens boivent des coups et si il y a une télé allumée, les gens la regardent. Ils ne parlent plus, ils regardent la télé. Les concerts c'était un peu devenu ça et ce n'était pas très excitant. Le projet avec Béatrice, ça ne va pas être un robinet à images, il va y avoir des images de temps en temps mais il va y avoir une manière d'amener les images.

P-C : C'est aussi un autre contexte. C'est pas un concert de rock.

M-C : Oui, et sur les concerts duo on préfère le côté très rock et même ne pas avoir forcément beaucoup de lumières.

Il y a aussi, une nouvelle fois, une participation de Françoise Lebrun, est-ce que c'est encore un extrait de film ou un texte écrit pour le morceau ?

M-C : C'est un texte écrit pour le morceau. Quand on a fait le concert de reformation avec Diabologum, Françoise nous a contacté une semaine avant pour nous rencontrer, via un ami commun, et éventuellement faire quelque-chose avec nous sur scène. On n'y croyait pas beaucoup. Finalement, on s'est rencontré, on a fait ce truc là qui s'est fait la veille avec juste une seule répétition, c'était très spontané. Ça a été assez bouleversant, c'était le concert de reformation de Diabologum plus Françoise Lebrun qui arrive en vrai à la fin. Pour être honnête, c'était vraiment bouleversant. Ça s'est un peu passé comme avec Béatrice Utrilla, je suis resté en contact avec Françoise. On s'est revu plusieurs fois, on a fait une intervention dans un cinéma pour présenter La Maman et la putain et parler aussi du rapport entre le morceau de Diabologum et le film. Au moment du nouvel album, comme le rapprochement s'était toujours fait au travers de La Maman et la putain, pendant quinze ans les gens parlaient de Diabologum à Françoise et nous on nous parlait du film. Je me suis dit, voilà, on est devenu amis, je sais que Françoise ce n'est pas juste ce film-là, nous non plus d'ailleurs mais dans l'esprit de plein de gens c'est ça. J'ai eu cette idée, je n'osais pas trop au début, je flippais quand même un peu. Parce qu'inviter Françoise, écrire un texte, la faire intervenir sur un texte, après La Maman et la putain, c'était un peu casse-gueule (rires). J'ai écrit un texte et je lui ai envoyé en lui proposant de participer et elle a été enchantée et ravie. Elle a fait sa prise voix à distance. Et, c'est un peu comme quand on travaille avec Béatrice ou comme quand on a bossé avec Pascal de Mendelson, ce sont des choses qui coulent de source. Je n'ai pas eu besoin de passer quatre heures au téléphone à expliquer à Françoise ce qu'elle devait faire. Elle est arrivée, on était même pas là à l'enregistrement, c'est un copain qui a enregistré sa voix, elle a écouté une fois la musique, a demandé qu'il la coupe et elle a enregistré sans la musique. Le pote m'a envoyé la piste voix et en studio j'ai dit « tiens, c'est là que ça rentre », j’appuie sur le bouton, on a enregistré la piste depuis l'ordinateur vers le magnéto à bandes et c'était juste génial !

Oui, pour l'avoir écouté, ce morceau est vraiment incroyable.

M-C : Oui, c'est un chouette morceau et à la fin, sa voix, c'est magnifique. Donc au final, c'était une grosse trouille mais en fait c'était cool ! (rires)

P-C : C'est un morceau assez particulier. Pendant l'enregistrement, il y a un truc qui est sorti comme ça, un peu de nulle-part.
M-C : C'est parce qu'au début, c'est des bouts de morceaux, des choses que j'avais à la guitare, d'autres qu'on avait joué et ça s'est mis en place une semaine avant l'enregistrement. On l'a pas vraiment mis en place, on l'a joué un peu comme des jazzmen. On l'a un peu répété, on a fait qu'une seule prise en studio, y a aucun overdub, tout est joué live. C'est le seul morceau de l'album qui est comme ça. C'était pourtant le morceau qu'on avait le moins répété et qui était le moins écrit. C'était assez incroyable.

D'ailleurs, est-ce qu'il y a une différence dans votre travail commun dans la préparation de cet album par rapport au précédent ?

M-C : C'était un peu pareil.

P-C : Disons que là on avait deux ans de tournée ensemble dans les pattes.

M-C : On avait plus joué ensemble.

P-C : Musicalement, on se connaît très très bien. Ça fait quand même un petit moment qu'on joue ensemble. L'écriture était différente parce que l'histoire qui est raconté est complètement différente. Moi je me sens plus impliqué là qu'il y a deux ans. Ça fait partie d'une autre histoire, de trucs beaucoup plus personnels auxquels j'ai assisté. C'est une question que je ne pose pas vraiment, quand tu joues avec quelqu'un, ça ne s'exprime pas vraiment par des mots.

M-C : Mais même à l'époque de Notre Silence, les morceaux s'étaient mis en place ensemble. L'essentiel de l'album s'était mis en place en trois jours, moi j'avais les textes finis, des accords et des mélodies mais c'était pas terminé.

P-C : On avait vraiment la même envie au même moment et ça s'est vraiment fait simplement. C'était hyper agréable. Ça faisait un moment qu'on traînait la patte, qu'on savait pas trop et d'un coup...

M-C : Ça a été magique.

P-C : C'est ça et après avec les concerts, ça a fait que monter, monter. Je pense que toi aussi mais moi musicalement, je me suis vraiment épanoui ces deux dernières années. Je me suis vraiment éclaté comme jamais auparavant. Pourtant, c'est beaucoup plus simple mais le fait que ce soit un peu épuré au niveau instrumental, le tempo qui est vachement lent. Du coup, ça laisse le temps de respirer, de se poser, de créer une ambiance. On ne court pas derrière la montre, ce ne sont pas des morceaux où il y a un début et une fin, on choisit un peu la fin si on a envie de la changer. Et ça c'est intéressant, raconter des histoire comme ça, c'est beaucoup plus intéressant.

M-C : Après le nouvel album s'est vachement construis, comme on était tout le temps en tournée, parfois on faisait déjà tourner les morceaux en balances pour bien les répéter, les nouveaux morceaux. On ne les jouait même pas en concert. À un moment donné, on était un peu prisonniers de Notre Silence parce que c'était un peu dur de jouer autre-chose et de mélanger. D'ailleurs là sur les sets qu'on fait en ce moment, on ne met pas de morceau du premier album. On se focalise sur le nouveau. Minuit dans tes bras s'est peut-être un peu plus fait tous les deux puisqu'on tournait. Dès que j'avais un riff de guitare, une bribe de morceau, hop on travaillait ensemble et ça s'est beaucoup construis comme ça. C'est à Rome aussi qu'on a vraiment commencé à travailler sur l'album.

P-C : C'est là qu'on a senti le tournant par rapport au premier album.

M-C : On est partis à Rome pour faire un résidence, on devait travailler une semaine à la villa Médicis avec un musicien italien. Finalement, ça ne s'est pas fait parce qu'il était malade. Il rentrait de tournée et il est tombé malade. Donc, on s'est retrouvé une semaine à la villa Médicis dans une espèce d'ambiance de chapelle. On s'est donc dit qu'on pouvait bosser pour nous. Il n'y avait pas vraiment de morceaux terminés à la fin de la semaine mais tout s'est joué là, est sorti de là. La version longue du morceau « Minuit dans tes bras » c'est un truc que j'avais enregistré à Rome. On l'avait bossé à deux là-bas mais j'avais aussi fait une petite vidéo sur internet avec ces espèces de sons et de riffs. Toutes les bases de l'album sont arrivées là et ça a mis presque un an à se construire petit à petit et c'est marrant parce qu'avec le recul, tout est parti de Rome alors qu'en rentrant on avait aucun nouveau morceau de réellement terminé. Mais on avait plein de pistes différentes qui étaient parties de là.

Pour les textes, est-ce qu'ils naissent avant la musique, après ou est-ce qu'il n'y a pas de règle ?

M-C : Y a aucune règle. Il y a parfois des riffs qui donnent naissance à un texte, parfois ça arrive en même temps. Ça arrive aussi qu'avant j'ai du texte, des phrases. Parfois, à partir de plusieurs textes que j'ai écrit, j'ai juste un couplet. C'est vraiment une sorte de cuisine qui se fait de manière hyper aléatoire, il n'y a absolument aucune règle.

Est-ce que ça te prend beaucoup de temps pour arriver à cette sorte d'intimité que dégagent les textes ? Il y a ce côté autobiographique mais pourtant aussi un peu universel qui peut toucher tout le monde.

M-C : Du temps ? Non, généralement ce que je garde ce sont les choses qui sont arrivées les plus vite. Les trucs super laborieux où il faut réécrire et réécrire pour arriver à quelque-chose, en générale ça ne donne rien. Les meilleurs trucs se font plus vite. Après, ça peut arriver que je m'obstine sur un texte et que ça ne marche pas alors je jette à la poubelle, je récupère des bouts, des phrases mais en générale les choses les meilleurs sont celles qui sont venues le plus facilement. Les trucs laborieux ça ne débouche sur rien. Quand ça ne marche pas, ça ne marche pas. Avant, je m'obstinais beaucoup plus. Même pour la musique, il faut que le truc coule vite et que ça marche vite. Si il faut trop travailler sur un morceau, même si l'idée semble bonne, c'est qu'il y a un problème à la base. Au final, c'est beaucoup de travail pour rien. Aujourd'hui, on a un meilleur discernement, on commence beaucoup de trucs mais on en garde finalement pas énormément.

Pour finir, la fatale question nostalgie. Je crois qu'il était question pendant un moment d'une réédition du dernier album de Diabologum.

M-C : Oui, enfin on a toujours rien fait, pour l'instant on n'en parle pas mais un jour ça viendra. C'est sûr qu'on le fera, j'espère pas dans quinze ans mais ça se fera. Il va falloir qu'à un moment, on se prenne par la main et qu'on arrive à le faire.

C'est un disque qui a une place particulière dans l'esprit de beaucoup de gens.

M-C : Oui, mais peut-être que si on le réédite ou qu'il avait été réédité depuis dix ans, personne n'en aurait rien à foutre ! (rires). On se dit ça des fois. Des fois rester mythiques, c'est bien ! (rires). Ça entretient un mystère énorme !

Je regardais sur Ebay et ça tourne autour de deux cent Euro.

M-C : Moi, ça fait plusieurs années que j'ai envie de rééditer parce que je suis assez scandalisé quand je vois ces prix-là et le CD à 75 Euro. Et au final, c'est toujours les mêmes qui se font du fric et pas les artistes et je ne pense pas qu'on se ferait de l'argent si on rééditait ce disque, vraiment pas. Moi ça me ferait plaisir que ça soit réédité un jour mais ça le sera. C'est vrai que la vie va vite, il faut déjà s'occuper des projets qu'on a tous. Donc, s'occuper des trucs d'il y a quinze ans ce n'est pas le truc le plus existant du monde et ça met en branle un tas de choses un peu compliqué à gérer.

Est-ce que c'est désagréable d'avoir toujours des questions sur Diabologum ?

M-C : Non. Mais ce qui est clair maintenant c'est qu'on ne rejouera plus jamais ensemble. C'est clair, je le dis : on ne rejouera plus jamais ensemble. Pour les gens qui lisent ça, on peut déjà noter que ce n'est plus la peine de nous poser la question « est-ce que vous allez refaire des concerts ? ». Nous ne referons plus jamais de concert. Mais sinon, c'est plutôt agréable d'avoir sorti un disque à un moment donné qui a marqué autant de gens et qui est devenu une référence. Si on ne faisait rien d'autre aujourd'hui, c'est sûr qu'on le vivrait mal. Mais vu qu'on sort des disques, qu'on est actifs, on ne vit pas dans le passé. Entre Diabologum et aujourd'hui, il y a eu je ne sais pas combien de groupes, de projets et d'albums sur lesquels j'ai travaillé.

Les autres aussi.

M-C : Oui, tout le monde.

C'est vrai aussi que le concert de reformation dont tu parlais tout à l'heure, avec Françoise Lebrun, j'ai seulement vu des vidéos, mais c'était tellement incroyable.

M-C : Oui, mais je pense qu'il vaut mieux le garder comme ça plutôt que de se retrouver confrontés à un fonctionnement de groupe.

Pour parler du présent, et même de l'avenir, l'album sort en janvier. Les projets pour après ?

M-C : Tourner ! Il y a déjà pas mal de dates de prévues. Et tout n'est pas tombé parce que la promo de Minuit dans tes bras commence à peine.

P-C : Encore une année bien chargée !

Merci beaucoup !

Michel et Patrice : Merci !

25 novembre 2014

The Revolution will not be televised

Depuis que je suis tout môme, je regarde Arte. Depuis 4 ans, je n'ai plus de télé et je regarde quand même Arte. Parce que c'est la seule chaîne avec une vision cool et décloisonnée de la culture, qu'on peut y voir des interviews de musiciens qu'on ne voit pas ailleurs, des supers docus sur la musique, des reportages fous sur des scènes metal et punk des quatre coins du globe... Sauf que...

En regardant le dernier Personne ne bouge, une "critique musicale" (présentée comme telle) nous parle de Britney et de son acte de rébellion capillaire. Parce que oui, tu comprends, se raser la tête comme elle l'a fait, c'est dire merde au bizz, c'est un acte dangereux, limite terroriste. Mais déjà fait, par Sinead O'Connor et pour des raisons beaucoup plus valables. Et cette critique nous sort que quand elle était jeune elle écoutait autant Britney que Fugazi, on passe la ligne. Est-ce qu'on peut dire tout et n'importe quelle connerie dans une émission à visée culturelle ? Citer Fugazi quand on parle de Britney, est-ce que ce n'est pas le dernier signe, la dernière preuve qu'on brasse du vide ? Pourquoi alors ne pas comparer la carrière des 2BE3 avec celle de Crass ? Ou dire que Fauve est inspiré par les Bérus ?

Personne ne bouge était une grande émission quand elle donnait à découvrir de façon ludique et jamais prise de tête des choses passionnantes. Elle creusait l'histoire du cinéma et de l'entertainment comme jamais aucun autre programme télé ne l'avait fait. La plupart des rubriques étaient drôles et grinçantes sans jamais tomber dans le people de bas étages. Mais depuis la rentrée, il y a des ratés. Où est la voix qui faisait tout le sel d'archétype-top ? Pourquoi ces inutiles clips commentés à la va-vite ? Et ces intervenants qui, quand ils ne sont pas passionnants et érudits, sont des scribouillards de catalogues de potins qui s'extasient sur Britney ou Kanye West. Pourquoi quand une émission de télé publique est capable de bien parler de bon cinéma, elle parle de musique de merde ?

Comme si cela ne suffisait pas, depuis quelques mois, tous les documentaires musicaux, quand ils ne sont pas de simples rediffusions (les très bons documentaires sur Kraftwerk et Pink Floyd) sont mal foutues et rabâchant les mêmes lieux communs sur l'histoire du rock. Le documentaire sur le thème de la mort dans les musiques actuelles promettait beaucoup de choses et n'était finalement qu'un pétard mouillé fait des éternels clichés sur Jim Morrison et le club des 27. On s'en branle du club des 27 et des légendes bidons sur le rock à papa. Toutes les périodes musicales depuis les années 50 sont pourtant riches et variées, remplies d'anecdotes et d'histoires qui plairaient à tous ceux qui aiment Arte parce qu'elle les rendaient curieux.

Heureusement, Tracks est toujours là pour proposer des sommaires curieux et défricheurs et partir dans tous les sens tout en respectant toujours sa ligne éditoriale. On peut trouver que l'ancienne présentation était mieux, mais le changement fait toujours du bien quand le fond conserve encore et toujours cette qualité incroyable. Depuis la rentrée, chaque émission a proposé des reportages et des interviews qui tape toujours juste. Pourtant, ce programme existe depuis 17 ans !!

S'il te plait Arte, redeviens la chaîne de télé qui, quand on l'allumait par hasard, nous donnait envie d'ouvrir nos oreilles, de fouiller dans les bacs des disquaires et de nourrir notre curiosité par plus de curiosité.

Sinon, comme d'hab, éteins ta télé, mets un disque et sois cannibale !

20 novembre 2014

Attaquer le soleil

En 2013, sortait le troisième album de Sombres ForêtsLa Mort du soleil. Un disque qu'il faut écouter seul, dans le noir, quand il ne reste plus rien d'autre à faire que regarder le soleil mourir. Impressions.

Tout à coup, il fait si froid quand naissent les premiers sons, il n'y a plus rien autour, que cette musique. "Des Épaves" remplit tout l’air ambiant avec ses quelques notes de guitares posées sur des nappes vaporeuses, elles finiront par prendre vie pour venir vous assaillir. Puis c'est au tour de ces "étrangleurs de soleils" de venir semer la désolation. Une lenteur sépulcrale au son du tonnerre ouvre le morceau, cette fois, il n'y a pas de retour possible.

Est-il vraiment nécessaire de tenter de décrire cette suite de sept longs morceaux, qui nous prend de force pour nous raconter cette histoire puissante de soleils qui s'éteignent aussi fatalement qu'inexorablement ? Existe-t-il simplement des mots assez plein de sens pour dire la fin de tout et son inédite et incroyable beauté ? Car c'est cela que Sombres Forêts parvient à nous décrire. Ecoutez "Brumes" dans l'obscurité qui précède le sommeil et vous verrez naître des images. De celles qui vivent au fond de nous sans qu'on n'en sache l'origine, comme si l'histoire des forces qui nous entourent était inscrite dans notre inconscient. Ne demandant qu'à être réveillée.

C'est à cela que parvient La Mort du soleil, comme sur "Au Flambeau" où de simples notes de piano et une rythmique décharnée suffisent à faire naître une atmosphère désolée mais toujours passionnante. Et il y a cette voix, lointaine, comme noyée, qui nous guide dans ces dédales sans fin, dans ce voyage vers là où il ne subsiste plus aucune lumière. Le plus surprenant, c'est qu'il n'est jamais difficile de se laisser happer pour s'enfoncer toujours plus loin dans l’abîme.

Le black metal de Sombres Forêts est aussi mélodique qu'il est triste et sombre. Mais surtout, il s'en dégage à chaque instant une beauté noire, profonde. Tout ici est plein d'un magnétisme aussi intense que mystérieux et la catharsis que représente l'écoute de l'album dans son intégralité est finalement salvatrice, par les charmes noirs qu'elle finit par distiller dans notre esprit.


"J'ai tout donné au soleil, tout, sauf mon ombre." Apollinaire.

Contemple ce qu'il reste après la fin et sois cannibale.

13 novembre 2014

De Beaux lendemains

Salut vieille carne, ça fait longtemps, c’est vrai qu’on n’a plus le temps de prendre des nouvelles et qu’on est un peu happé par le vide qui nous entoure et finira certainement par nous dévorer. Charmant programme, n’est-il pas ? Il était donc grand temps de revenir papoter musique et récemment la bonne nouvelle, c’était le retour du chanteur d’AmandaWoodward avec un tout nouveau groupe basé en Espagne : RouilleOn tue ici est un bout de vinyle oxydé qui s’écoute très fort.

Un vieux chanteur bien de chez nous voyait la rouille « comme une déchirure, une blessure qui ne guérira pas » (tralala), ici la rouille c’est cette couche sale qui finit par s’agglomérer sur les armes qu’on a depuis trop longtemps déposées. Chez Rouille, il n’est jamais question d’un quelconque espoir ou d’une envie d’aller de l’avant, d’essayer d’y croire, mais plutôt de faire le froid constat qu’à force de tenter et de faire, il ne reste que de l’usure et du cynisme.

Les textes sont tous emplis d’une résignation glaciale qui dépeint ceux qui n’ont pas réussi à aller au bout de leur idéalisme. « On avait failli être bien, pas longtemps on en était pas loin. » Ainsi, tous les combats menés semblent lointains et le présent d’autant plus douloureux que le but a été parfois palpable : « voler, s’envoler mais jamais décoller ». Si aujourd’hui est bien sombre, le disque se termine par une évocation du futur encore plus noire : « on aura une autre gueule, on sera sales et seuls ».

La musique est ici l’illustration tangible de cette désillusion, Rouille pratique un screamo lent, comme dépossédé de tout entrain, les émotions dont le genre est le vecteur sont ici réduites à leur part la plus négative. Certains passages instrumentaux post-rock assurent le même résultat fait de lenteur et d’obscurité, apportant cette sensation que la musique de Rouille ne peut pas décoller ou aller vers la lumière. De tous ces éléments naissent l’impression que le tout est écrasé par un poids, comme la rouille qui recouvre la pièce qui illustre la magnifique pochette du LP.

On tue ici 
est un disque court, fruit d’une passion palpable pour la musique bien ouvragée. Comme si au moment où on avait perdu toute envie pour le reste, il restait ce besoin de faire cela de la plus belle façon qu’il soit, avec honnêteté et sans aucun autre but que de le faire. Un disque qu’on n’attendait pas et qui se révèle tout simplement nécessaire.


« Ivre de périr au feu, libre de mourir au fond, ivre de subir le jeu, libre de souffrir le peu, de ce qu’il nous reste au fond, bien pire que des enfants. » « Même au vent je mens », Rouille.



Laisse-toi lentement oxyder et sois 
cannibale !

2 octobre 2014

Des Types et une boite à rythmes

  Quel est le comble pour un batteur qui tient un blog sur la musique ? De pondre un article sur des groupes qu'il adore et dans lesquels il n'y a pas la moindre trace d'une batterie, une vraie ? Ce n'est certainement pas si simple car tous les groupes qui seront cités ici possèdent un impact rythmique dévastateur. Mieux, la boite à rythmes y est toujours un élément indissociable de leurs sons, faisant presque d'elle un membre à part entière de chacun d'entre-eux. Et si l'esprit punk se cachait dans une simple machine ?


Tout commence en 1977 quand un groupe français sort de nul-part un 45T sous le doux nom de Panik. Ils s'appellent Métal Urbain, débarquent avec leurs guitares et leurs synthés et vont révolutionner le punk de France à venir avec une magnifique attitude de branleurs. La musique est froide, sans mélodie, le chant est criard et vindicatif. Les tables de la loi d'un autre punk, porté par des rythmiques mécaniques et des sons électroniques, se trouvent dans une poignée de 45T sortis entre 77 et 79 par ce groupe aujourd'hui culte. Cela malgré une reformation dans les années 2000 qui les verra sortir un album complètement dispensable, sans être véritablement mauvais.

Quatre ans plus tard débarque l'un des meilleurs groupes de punk français, Warum Joe. Injustement peu connu par la faute du succès écrasant de certains, Bérurier Noir en tête, les Warum n'en sont pas moins excellents. Beaucoup plus mélodique que ne l'était celle de Métal Urbain, la musique est ici au service de textes aussi originaux qu'étrangement marquants. Ils sortent également un disque dans les années 2000, après dix ans sans nouvelle discographique. Mais contrairement à l'essai de Métal Urbain, Au Milieu de ta forme est un disque excellent de bout en bout, rempli raz la gueule de tubes jouissifs aux textes intelligents et fun : "Mauser Fucker", "Copkiller", "Babel Web", "Les Feux de l'amour" ou "La Citée des chasseurs" mais la liste pourrait contenir tout l'album. Un must !

On ne peut pas parler de boite à rythmes sans évoquer les Ludwig Von 88. En une quinzaine d'années et presque autant d'albums, ils ont marqué le punk de France avec des textes parfois complètement débiles mais toujours poétiques et un humour aussi ravageur que politiquement incorrect. Et toujours cette boite à rythmes, immuable et simple, aussi importante dans l'identité du groupe que leurs pochettes d'albums faites de détournements et de collages. Une ribambelles de tubes ont marqué deux générations de punks telles que "New Orleans", "77" ou "Dans le jardin d'Allah".

Plus près de nous, comment ne pas parler de Violence Conjugale et de son unique album éponyme sorti chez BornBad en 2012. Une voix, un synthé et des textes glaciaux et romantiques parlant de guerre et d'amour dans la plus pure tradition Minimalwave. Un disque qui aurait pu sortir il y a 35 ans, un véritable voyage temporel au pays des musiques glacées.

On a déjà parlé ici des géniaux Austerity Program, dignes descendants des ancêtres Punk/Noise que sont Big Black, Rapeman et Scratch Acid. Les deux premiers occupent Steve Albini dans les 80's, avant qu'il ne devienne ingénieur du son sur la majorité des grands albums rock indé des deux décennies suivantes. Big Black annonce toute la scène noise rock à venir : guitares tour à tour stridentes ou lourdes et rythmiques tronquées. Scratch Acid est l'entité qui allait devenir Jesus Lizard, LE groupe noise des 90's. La boite à rythmes est ici aventureuse et versatile et s'accompagne du chant si reconnaissable de David Yow.

Chacun des groupes cités se définissent autant par leurs autres membres que par cette machine magique qu'est une boite à rythmes. Elle définit leurs sons autant que peut le faire le jeu d'un guitariste ou d'un bassiste et n'est jamais un simple beat interchangeable. Par son côté cheap et bien plus facilement transportable qu'une batterie, elle est porte aussi une dimension symbolique d'une certaine idée du Do It Yourself.


"La machine conduit l'homme à se spécialiser dans l'humain." Jean Fourastié

La machine, elle aussi, est cannibale.

19 septembre 2014

Without Warning

Il y a une petite quinzaine de jours, je me suis enfin décidé à chercher sous le matelas quelques petits billets de couleurs pour m'acheter le coffret réunissant les trois premiers albums des Wipers. Un truc qui d'apparence ne paye pas de mine, moche boite de plastoc, mais qui rassemble l'intégralité des morceaux de Is This Real?, Youth Of America et Over The Edge, ainsi que pas mal de démos et des titres sortis sur des EP. Depuis je me sent comblé de musique comme un jour fantasmé d'anniversaire, pour longtemps.

Quand en 79 sort Is This Real?, les Wipers sont déjà différents de ce qui se fait partout sur le vaste territoire des Etats-Unis. Plus mélodique ou beaucoup plus lent comme sur les incroyables "D-7" et "Potential Suicide", le groupe arrive avec une petite dizaine d'années d'avance sur le gros de la vague indé. Autant dire qu'à l'époque ça devait faire tout drôle tant à l'écoute aujourd'hui on pense à Nirvana, à la dernière période de Hüsker Dü, à Sonic Youth sur le passage noise de "Youth Of America" (un morceau punk de 10 minutes en 81, faut oser) ou plus généralement à toute la scène post-hardcore made in Dischord qui ne naît qu'au milieu des 80's.

Et si les Wipers sont précurseurs, finalement on s'en fout un peu, parce que l'autre observation qu'on se fait à la découverte de ces trois albums, c'est qu'ils sont véritablement excellents. Le premier reste le plus efficace et direct avec des tubes punks comme "Mistery" ou "Window Shop For Love". Il est rempli de mélodies instantanées sans être trop faciles et déborde d'une énergie redoutable, tout à fond. Il est pour moi l'exemple de l'album punk parfait : honnête, frontale et sans concession. Et pourtant déjà ces quelques titres lents, glaciaux...

Youth Of America souffre certainement de la présence de son morceau-titre qui rend le reste de l'album un peu anecdotique, véritable brûlot de dix minutes, hurlé, viscéral et totalement autre pour l'époque. Enfin il y a tout de même "No Fair" qui démarre froid, lancinant, figé et pourtant terriblement magnétique avant de décoller en une sorte d'hymne sombre.

Puis c'est la claque Over The Edge. L'album démarre direct par "Over The Edge" et ça fonctionne d'entrée, c'est immédiat. La voix est devenu pour éraillée, on se croirait presque chez Fugazi, bien avant l'heure. Il y a ici un côté émotionnel que tous les fans de post-hardcore ne peuvent qu'apprécier. Les morceaux incroyables s'enchaînent les uns après les autres : "Doom Town" est presque motorique, on pense aux Thugs et on est encore surpris. "No One Wants An Alien" te prend par la main pour te présenter un sale constat. Il faut parler de ces textes, premier degré mais aussi parlant que sombres, non plus désespérés mais déjà résignés. Et puis, il y a "The Lonely One" dont la voix sur le refrain évoquera bien des souvenirs à ceux qui ont grandi en écoutant Nirvana. Un morceau de grunge bien avant la lettre mais surtout d'une intensité émotionnelle allant crescendo, un véritable chef-d'oeuvre sur un album qui l'est tout autant.

Et ce ne sont que les trois premiers albums...

"It's not the truth I see. It's just a mockery. Don't need to waste my time. You know I've really tried. You take and never give. It get's so hard to live. I'm hangin on a ledge. Pushed straight over the edge." "Over The Edge".

"Certains sentent la pluie en avance, d'autres se contentent d'être mouillés." Henry Miller

Cours t'abriter, sois cannibale !

13 septembre 2014

Final Cut

Il arrive parfois qu'on tombe sur un groupe dont on n'a jamais entendu parlé, qu'on écoute son dernier LP d'une oreille distraite et qu'on se retrouve avec son nouveau groupe fétiche. Tout simplement.

The Austerity Program c'est facile, c'est deux types et une boite à rythmes et Beyond Calculation est une suite de huit morceaux plus ou moins longs. On sent tout de suite que quelque-chose de pas très habituel se passe quand on écoute pour la première fois. Puis suivent deux cents autres sans qu'on comprenne vraiment pourquoi. Car The Austerity Program est insidieux et malin, il garde son morceau le plus accessible et le plus mélodique pour le placer en fin d'album, s'arrange pour en faire une claque ultra addictive, te forçant par là à remettre le disque au début, encore et encore.

Pire. L'écoute répétée rend l'impact de ces quelques titres de plus en plus frontal. Cette rythmique simple et répétitive qui joue avec la mesure, doublée par une guitare appuyant la frappe, te découpe la tête patiemment en 38 petites minutes à l'aide d'un rasoir rouillé et taché de graisse. Tout cela te laisse pantelant, simple corps idiot cherchant à retrouver sa petite tête et ses esprits, dans le but assez incompréhensible d'avoir l'intelligence nécessaire pour rappuyer sur lecture. Et de te refaire couper en deux, comme ça pour le plaisir, ad vitam æternam.


Un disque court, coupant et sale, du noise-rock qui réussit à ne pas sonner comme mille autres groupes par la magie jouissive d'une boite à rythmes, une recette si simple qu'on reste surpris qu'elle fonctionne aussi bien. Il n'en fallait finalement pas plus pour tenir une nouvelle marotte qui fait du bruit en cassant de l'os.  

"Tout est bruit pour qui a peur". Sophocle

Pose ton cartable, mets un disque et sois cannibale

11 juillet 2014

Before Midnight

Depuis le temps que j'espérai pouvoir voir Bâton Rouge sur scène, qui plus est accompagné pour l'occasion de Torino, l'autre groupe du bassiste Gwen : le rendez-vous de ce vendredi 4 juillet semblait immanquable. Et pourtant...

Le concert qui devait se dérouler à la Mécanique Ondulatoire dans le 11e me donnait une bonne occasion d'aller traîner autour de Bastille avec quelques amis. Finalement, un fâcheux dégât des eaux a forcé les organisateurs à trouver un autre lieu, un bar juste derrière le périph' à Bagnolet. Le temps de boire quelques verres rue de la roquette et de prendre le métro, nous arrivons dans un petit endroit. Il fait chaud très chaud, il n'y a pas beaucoup de monde mais qu'importe, ceux qui sont là le sont pour une bonne raison.


23h. Le temps de s'assurer que nous n'arrivons pas trop tard et de commander une bière, Bâton Rouge commence à s'installer. Je suis un peu déçu d'avoir louper Torino dont le premier EP n'en finit pas de tourner sur ma platine. Les premier accords résonnent et déjà la chaleur et l'alcool ne sont plus qu'un mauvais souvenir. Le set mélange avec équité les morceaux de Fragments d'eux-mêmes et de Totem, le petit dernier. L'ambiance est chaleureuse, le groupe humble et dans la petite foule qui l'entoure, on surprend quelques visages souriants ou en train de scander des bribes de paroles. Le temps court après lui-même, il est déjà l'heure de la fin. À la demande de quelques voix, le groupe joue un dernier morceau. Ce sera « Sur un banc » dont le refrain est repris en chœur par tous. Une dernière bière, quelques paroles échangées avant de repartir, un vinyle sous le bras.

3 juillet 2014

Choses Secrètes

Parfois, on s'en tamponne de l'actualité musicale et cela même, comme en ce moment, quand elle est riche et pleine d'énormes claques. C'est simplement parce que quelque-part dans sa mémoire, on a retrouvé l'idée d'écouter un assez vieux disque de Nick Cave. Il s'agit de No More Shall We Part et, grand problème, remettre le nez dans ce disque, comme ça innocemment, peut vite finir par devenir un but en soi, presque un projet de vie. "Tu fais quoi pour les vacances ? -J'écoute Nick Cave." Impressions.

Ça commence tout de suite par "As I Sat Sadly By Her Side" et on entrevoit dès ce morceau qu'il va être difficile de sortit de cet album. D'abord il y a cette mélodie, toute simple mais terriblement prenante, et la voix du grand Nick qui vient nous prendre sous son aile démesurée pour nous raconter une histoire. Ou plutôt vient-il pour nous montrer une scène, un dialogue entre deux amants. Les paroles sont sombres et mélancoliques à souhaits : "God don't care for your benevolence/Anymore than he cares for the lack of it in others". Une entrée dans l'album comme un début de film, le noir dans la salle vient de se faire, l'ambiance commence à se distiller. On est dedans.


"Hallelujah", et ses presque huit minutes, l'ambiance est déjà installée, on peut rentrer dans le vif du sujet. Après une introduction avec une lente mélodie au violon, la voix arrive et nous emporte très loin, tout au fond de nous-mêmes, là où il peut faire très froid ou très chaud selon l'humeur. C'est surtout là que se trouve notre âme et c'est à elle qu'on s'adresse ici. Depuis que j'écoute cette chanson, je me surprends souvent le soir, une cigarette à la bouche, à scruter la nuit. Si j'y trouve quelque-chose est une autre histoire... Enfin, il y a cette fin, ces chœurs féminins qui viennent parachever la violente mélancolie qui nous prend à la gorge. Forcément, on laisse le disque tourner, on n'a plus rien à faire d'autre aujourd'hui, si ?


Plus loin, "Fifteen Feet Of Pure White Snow" continue dans le storytelling sombre. Tout le monde est partis, les filles n'ont pas mis leurs mitaines, y a pas mal de neiges dehors et Nick s'inquiète. Le titre revient tout au long de la chanson, il tient lieu de refrain et donne lieu à des envolées presque lyriques, tous chœurs dehors et d'une beauté grisante. Ici encore, la capacité du monsieur (et des Bad Seeds) à nous plonger dans une histoire, à créer une tension et à nous donner à voir des images fortes, est saisissante. 


"God Is In The House" est un cas à part. La musique voudrait nous faire croire que, oui, dieu est partout autour de nous et que tout le monde est heureux. Mais le texte ironiquement, dit tout le contraire. "Queer bashers with tyre-jacks/Lesbian counter-attacks/That stuff is for the big cities". Nick se moque du tout beau, tout bien rangé et pour le dernier couplet, sa voix se fait gutturale et menaçante. Une merveille de cynisme.


"Oh My Lord" est un autre point culminant du disque. L' histoire noire et dure comme une pierre tombale d'un homme qui subit une sorte de malédiction. Côté musique, le morceau monte doucement et est tendu comme les cordes du destin (ouais, ouais), il culmine chaque fois que Cave implore "Oh Lord, oh my lord" avant d'exploser sur les deux dernières minutes : une montagne d'émotions. On ne peut pas se défaire de ce morceau et de son histoire empreinte de gothique et d'un certain romantisme noir.


Juste avant la fin de ce merveilleux disque, il y a "Gates To The Garden", une chanson si triste et belle qu'elle nous oblige, par son magnétisme, à remettre le disque à son commencement, encore et encore. Il n'y a pas d'échappatoire possible et, quand on sait qu'ils sont nombreux les albums du grand brun a avoir cet effet, on se dit que l'hiver arrivera bien vite. Mais attends ? Il fait beau dehors... Oui, j'irai peut-être demain. Le beau temps attendra, lui aussi encore et encore.



"when you think you're climbing up, man / In fact you're climbing down"


Va courir par les rues chaudes et lumineuses ou sois cannibale.

23 juin 2014

Under My Skin

Je n'ai posté aucun article depuis le 13 mai mais j'ai, une fois n'est pas coutume (ahem), une très bonne excuse : c'est la date à laquelle est sorti le dernier LP des Swans, To Be Kind. Vous comprendrez alors aisément que j'avais autre-chose à faire, car les deux bonnes heures qui composent ce nouvel album sont riches, c'est peu de le dire, et demandent une attention particulière si l'on veut pouvoir les assimiler.

Il va falloir qu'on se fasse une bonne fois pour toute à l'idée que les nouvelles productions du groupe seront longues, très longues. À peine a-ton eu le temps de se noyer dans The Seer que la nouvelle fournée arrive : dix titres, d'une durée oscillant entre 5 et 34 (!) minutes pour le plus long. Certes, quelques-uns avaient depuis longtemps été joués sur scène, mais dans des versions différentes.

Une chose me saute aux oreilles dès les premières écoutes : on retrouve une partie de ce qu'étaient les Swans au début des 80's. Le décharnement rythmique rugueux sur "Screen Shot" et "A Little God In My Hands" et les structures Indus sur "She Loves Us" (quel putain de bon morceau !) rappellent Filth ou Cop. Mais la grande nouveauté ici c'est le groove, le feeling incroyable qui sous-tend les rythmiques et la guitare. Certains passages prenant presque des allures de Noise-Funk.

"Oxygen" est de loin le titre le plus accessible, une déclaration de guerre Noise/Post-Punk. C'est un régal d'entendre Michael Gira s'époumoner de la sorte sur album et c'est ce qui manquait grandement sur The Seer. Le break durant lequel ses cris sont calés sur la rythmique, syncopée pour notre grand plaisir, est une joie chaque fois renouvelé. Et ces cuivres sur les deux dernières minutes... Un des arguments de poids de ce nouveau disque.

Pour moi, le grand voyage de ce disque est sans conteste "Just A Little Boy", une ambiance minimaliste sombre et maitrisée qui captive grâce au timbre si particulier de Gira. Et ces guitares sales et tournoyantes qui répondent à ses cris possédés, ses appels de gourou à la limite de l'aliénation donnent une saveur particulière à ce morceau, sorte de Spoken Word/Blues cassé.

Il y a mille autres choses folles dont il faudrait prendre le temps de parler comme ces bruits stridents et tout simplement jouissifs qui viennent clôturer "A Little God In My Hands", les cordes fantomatiques qui habillent à merveille le texte désossé de "Some Things We Do" ou encore le fait que j'abime mes meubles à essayer de reproduire les parties de batterie de "She Loves Us". Tout cela mis bout à bout fait de To Be Kind la plus grande réussite des Swans depuis The Great Annihilator. Ce n'est pas rien.

«En me renversant, on n'a abattu (...) que le tronc de l'arbre de la liberté, mais il repoussera car ses racines sont profondes et nombreuses» Toussaint L'Ouverture.

Va bronzer ou sois cannibale !

13 mai 2014

Une Journée en enfer

En février dernier, encore (oui, il s'en est passé de jolies choses par chez nous) sortait le 4e album de Mondkopf, Hadès. Trois années se sont écoulées depuis le riche Rising Doom et il nous fallait au moins ça pour faire le tour du monstre. Et devinez quoi ? La créature a terriblement grandi, elle bout telle la lave en fusion. Chaudes impressions.

Le disque démarre très fort, avec "Hadès I" : du bruit, des larsens et des trompettes. Il n'est certainement pas question ici de danser, le ton est donné, ce disque sera placé sous le signe de l'expérimentation. Ce titre d'introduction est parfait puisqu'il captive tout de suite nos oreilles pour nous donner envie de nous plonger dans la suite. "Eternal Dust" et sa rythmique écrasante, jubilatoire, enfonce si besoin était le clou, on n'est pas là pour se déhancher. La lenteur du tempo et la multitude de couches de sons font plus penser à Sunn o))), au meilleur du Doom et du Drone qu'à la moiteur du dancefloor et ce n'est pas ici qu'on s'en plaindra.

Quand débute "Cause & Cure", on ne peut plus être autre-chose que conquis, asservis même tant la bête est en forme. Déluge rythmique, ce morceau est comme un énorme rubik's cube de lave en fusion qui vous tomberait sur la tête, comme ça sans prévenir. Et le pire c'est qu'on adore ça, viles créatures que nous sommes. Les nappes synthétiques de la fin du titre finissent de nous avaler pour nous convaincre. Encore ? "Immolate" reprend la même idée mais en allant plus loin, se développant en serpentant dans nos tympans. La rythmique est métallique voire Indus, à la première écoute on est simplement heureux d'entendre pareil morceau. Les suivantes le rendront chacune plus addictif, bienvenue en enfer, fais comme chez toi.

 "Here Come The Whispers" te laisse un peu respirer, sa longue introduction te faisant glisser toujours plus en profondeur, avant l'apparition de notes cristallines qui t'entourent d'un chaud manteau aussi confortable qu'inquiétant. Vient alors "Hadès II" et ses trompettes à te glacer sur place, entrecoupées de cassures Noise et de saturations malsaines. Le voyage continue avec "Absences", le titre le plus long de l'album et sans conteste le plus bruitiste et expé. Mondkopf réussit ici l'exploit de captiver simplement par la grâce des ambiances et la richesse sonore, continuant de distiller une narration par le seul son.

"The Stars Are Falling" déploie une rythmique martiale, lente et cathartique sur des couches de sons qui se font plus distordues à mesure que le morceau avance. Le diable commence à avancer doucement vers toi, est-ce lui qui te susurre à l'oreille sur le glacial "We Watched The End", longue plage tour à tour noire et lumineuse ? Ce morceau finit par des notes de piano sur des chœurs presque lyriques, avant l'apothéose d'"Hadès III" qui clôt l'album comme il avait commencé, dans la fureur des trompettes.

Le bon créatif que représente ce LP, le tour de force qu'il exécute en faisant le pari de l'extrême et du concept total, et l'immense richesse musicale qui le constitue en font une réussite complète. Si je notais la musique, comme d'autres notent les banques, je lui mettrais un bon 666/10. On en attendait pas moins de Mondkopf. La suite, vite !

"Je me crois en enfer, donc j'y suis." Rimbaud.

Brûle ou sois cannibale !

30 avril 2014

Le Voyage fantastique

En février dernier, ce n'était pas tout à fait l'hiver et la température est montée de plusieurs degrés lorsque We Insist! a sorti son 5e album, le bien nommé... Ah non, en fait c'est un sans-titre. Personnellement, j'aime bien les disques éponymes parce qu'ils sont souvent synonymes d'album-clé dans une discographie, pas toujours mais quand même. Et là, on peut dire que c'est le cas puisque nous avons entre les mains le meilleur album des parisiens. Alors, sinon il est bien comment ?

D'abord il est illustré par un très jolie clip de Mariexxme pour l'excellent "Another Era", dixième et dernier titre. Vous me direz "c'est bizarre non que ce soit le dernier titre du disque qui soit clippé ?" oui, peut-être mais quand la totalité d'un disque est faite de claques, de baffes et d'uppercuts, on fait ce qu'on veut et puis c'est tout. Car s'il n'y a pas un titre mauvais sur cet LP, on peut même dire qu'aucun morceau ne parait ne serait-ce que faible ou moins passionnant. Car de l’inaugurale "While The West Is Falling ?"et son riff magique au déjà cité "Another Era", on ne s'ennuie jamais. Mieux on tape du pied, on danse debout sur sa table basse une guitare mentale dans les mains, on saute partout et dès que la galette arrive en fin de course, on recommence. Après, on arrive en retard à tout ce qu'on doit faire dans sa vie (car oui, on ne peut malheureusement pas passer sa vie à écouter We Insist!) en disant : "désolé, j'écoutais le nouveau We Insist!". Chez moi, cet état de fait a duré 42 jours, je suis fâché avec mon patron, trois de mes voisins et plusieurs de mes amis, mais ça en valait la peine.

Je suis déjà dans un état surexcité, pourtant je ne vous ai parlé que de deux titres. Quand le massif et passionnant "Folding Iron" commence, on s'extasie sur ces riffs puissants et inventifs, sur cette basse qui nous fait tourner en bourrique et sur ce larsens et ces chœurs jouissifs. Rien que sur ce titre, il y a plus de bonnes idées que sur les albums entiers de certains groupes dont nous tairons les noms par gentillesse. L'incroyable, c'est que ça sera ça jusqu'à la fin : "First Draft" et ses cassures rythmiques recommandées par tous les ostéopathes du monde, "Elijah's Spell" et ses montagnes russes mélodiques, "Black Post White Ghost" qui commence comme une ritournelle noise et finit par vous emmener plus loin que le meilleur de Primus, etc. Pas besoin de tout vous dire par le menu, vous avez compris, cet album est la meilleure chose qui nous soit arrivée cette année. Il me faut tout de même en rajouter une couche :  "Four Nights In August" est une tempête pop, elle tournoie tellement vite qu'on n'est même pas surpris d'y croiser un accordéon. Qui d'autres pond des morceaux de cet trempe ?

On pense parfois à Mars Volta, à Primus ou à 31 Knots, peut-être aussi aux derniers Fugazi pour l'inventivité, moi, je pense juste que We Insist! est mon nouveau groupe préféré.


"le talent c'est la hardiesse, l'esprit libre, les idées larges." Tchekhov.

T'as faim, viens!

5 avril 2014

La Gueule Ouverte

Fin 2012, un disque sortait, c'était le meilleur album de rock en français depuis bien longtemps. Cet album s'appelle Traqueur et c'est le deuxième bébé de V13.

Jamais je ne me suis senti autant floué par l'actualité médiatique musicale que quand j'ai découvert V13 dans un article de Noise (ils font partie des rares à avoir parlé de ce disque, grâce leur soit rendu pour ça et pour être rien de moins que le meilleur magasine musical français). Peu de gens en ont parlé et cela restera toujours pour moi  un mystère. Pourquoi ? Parce que ce disque est une réussite totale, un uppercut.

Commençons par le commencement, d'abord il y a cette sublime photo de Rufus qui est un artwork simple et efficace comme on aimerait en voir plus souvent par chez nous. Ensuite, il suffit d'écouter l'album une fois pour se prendre dans la gueule la prod estampillée Steve Albini, rêche et nerveuse, parfaite. Et il y a ces neufs morceaux tous trempés d'une façon inespérée dans une sauce noise rock dans laquelle on n'avait pas croisé de textes en français depuis Virago. Le chanteur de Virago vient d'ailleurs pousser la gueulante sur "animal", tendu et élastique comme une corde d'arc.

Une ombre lointaine plane parfois sur ce disque mais n'est jamais envahissante, elle s'entend surtout sur quelques lignes de chants, c'est celle de Noir Désir. Mais alors dans ce que les bordelais avaient de plus venimeux et sale, dans leur meilleur côté finalement. La surprise ici est que sur chaque morceau V13 tient sa propre formule, son proche terrain de jeux dans lequel on aime à se faire chahuter sans jamais avoir le temps de jouer à la recherche de références faciles. La formule est bien à eux, grâce à un son tour à tour sec et chaleureux et surtout par la magie de textes forts, dont les images sonnent justes et toujours inédites.

Enfin la construction du disque est intelligente et permet d'éviter les pièges de l'ennui, "Ricardo Klement", "Personne m'attend" et "21 grammes" sont toutes aussi directes que brutales avant l'accalmie de la merveilleuse "Belle de jour". Le disque garde ensuite cette cadence de montagnes russes autant musicalement que pour ce qui est des textes. Le constat est donc simple : oui et encore ! Si je faisais partie des gens qui mettent des notes, je mettrais un bon 12/10, avec les félicitations de mes oreilles, de mes cervicales et de mon âme. Elle ne pèse que 21 grammes mais n'a pas été très souvent aussi conquise par un disque.

"Je suis un animal, mon instinct de survie me dit qu'il vaut mieux rester là. Le cœur est un incendie."
" Animal"


Soupèse ton âme en écoutant Traqueur et soit cannibale !

27 mars 2014

La Nuit

L'année passé, The Saddest Landscape a sorti deux EP, l'un est un split avec My Fictions et l'autre un 5 titres qui condense ce que le groupe sait faire de mieux : nous émouvoir et nous bluffer. L'hiver était gris mais si on les aime bien comme ça c'est parce que la musique du groupe sied merveilleusement à la nuit, à la pluie et au froid. Mais une éclaircie n'est jamais loin. Retour sur émotions.

Tout d'abord ce split. Je ne connaissais pas My Fictions et le court titre présenté ici ne m'a pas spécialement secoué les glandes lacrymales pour en faire des bâtons de pluies. Rien de très originale à l'horizon mais un screamo pêchu de bonne facture. Puis vient le gros morceau, "When You Are Close I'm Gone", collaboration de 13 minutes entre ceux-ci et The Saddest Landscape et alors là mes enfants tenez vous bien. Rarement un titre de screamo n'a su résumer en presque un quart d'heure un genre à lui tout seul, synthétisant tous les courants, toutes les émotions que ce style contient. Tour à tour violent, beau et sensible, ce morceau est une montagne russe émotionnel, un voyage cristallin riche de magie. La superbe progression qui s'installe tout au long de ces miraculeuses minutes permet au propos de réellement gagner en profondeur et en intensité. Magnifique exercice, leçon de style."Loss Will Find Us" est un tourbillon rythmique terriblement dense pour un titre typique de TSL, avec un peu surprenant mais magnifique passage parlé. Chez eux, ça marche à tous les coups les coups alors pourquoi se priver ?

Exit Wounded  est le disque que je n'aurai jamais osé espérer de la part des américains. Jamais un de leurs disques ne m'a tenu captivé sur la longueur avec autant d'aisance. Chaque titres, chaque changements de structures rythmiques sont une totale réussite de composition, de capacité à émouvoir et d'aménagement de l'espace sonore. Pour ce dernier point, et à mon modeste point de vue, jamais le groupe n'avait réussi sur un disque entier à occuper l'espace sonore de façon aussi riche et complète. Chaque instrument est à sa place, aucun passage d'ennui ou de redite. Le choix du format du disque semble alors parfait car il forme un bloc idéal, l'excellence de chacun des morceaux créant une sorte de cohésion. Je m'étonne qu'on n'est pas plus entendu parler de ce disque qui, si il ne bouscule pas les cadres bien établis de sa musique, montre le groupe au meilleur de sa forme. Un classique quasi instantané fait d'une poignée de titres dont on n'arrive pas à se lasser. Vivement la suite !

"La musique est la langue des émotions." Kant

Écoute trop de musique et sois cannibale !

20 mars 2014

Un Jour sans fin

Cet article va tenter de donner un point de vue construit sur une question que je me pose de plus en plus souvent et qui alimente les quelques débats que j'arrive à avoir parfois avec des gens pour qui la musique compte encore. Est-ce que le terme Postrock a encore un sens ? En a-t-il jamais eu ? Difficile de résister à cette interrogation du genre, avec une pensée dédaigneuse pour les fachos de tous bords qui croient que la question est de savoir si on va finir tous à poil ou si nos chères petites têtes blondes se font endoctrinées par de vilains instits pervers. Le vrai truc c'est de savoir si il vaut la peine aujourd'hui d'écouter ou d'aller voir sur scène un groupe qui se revendique de cette appellation, ainsi que de savoir une chose importante : c'est quoi en fait le postrock ?

Tout au long des années 90, plusieurs groupes font parler d'eux, ils se nomment Slint, Tortoise, Rodan, Mogwai, Godspeed You Black Emperor et quelques autres et à un moment où à un autre on leur à tous poser sur la tête l'étiquette "postrock". Sachant que le seul véritable point commun à tous ces groupes, hormis leur qualité reconnue par tous, est de trainer cette étiquette lourde à porter, on peut s'interroger sur la pertinence de cette catégorisation. Surtout quand celle-ci fait surtout office de raccourci de rangement plutôt que d'une réelle affiliation à un courant. La meilleure illustration de cela étant que nombreux sont les groupes à ne s'être jamais reconnu dans le terme, dont la signification profonde n'existe sans doute pas.

On pourrait extrapoler facilement et se dire que si Mogwai, par exemple, avait fait à peu prés la même musique trente ans plus tôt on l'aurait qualifié de Rock Progressif. On associe souvent le postrock a de longs morceaux, parfois instrumentaux, avec une progression dans le déroulement musical ou du moins une opposition passages calmes/énervés ou silence/bruit. Toutes ces descriptions pouvant aller comme des gants à certains groupes progs des 70's. On associe également souvent aux deux genres une volonté d’expérimentation ou de refus du format couplet/refrain. Les deux termes ont aussi été à différentes époques des fourres-tout ou des raccourcis dans lesquels on pouvait mettre tout et son contraire.

Il est aussi intéressant de s'apercevoir que quand un groupe se réclame fièrement de cette étiquette, nous sommes presque assurés de nous retrouver avec une vague copie des groupes cités plus haut. En revanche, quand l'appellation a une origine journalistique, la musique ainsi décrite si elle possède quelques affiliations avec une certaine idée de ce qu'est le postrock, aussi minime soit elle, on découvre souvent des groupes simplement inclassables ou régulièrement géniaux. C'est le cas des français d'Oiseaux-tempête et dans une moindre mesure de Totorro.

Le seul avantage qu'il reste alors dans l'utilisation médiatique de cette classification est alors la surprise qui nous est souvent réservée quand on s'apprête à écouter pour la première fois un groupe estampillé postrock. Il pourra en effet facilement sembler familier aux amateurs de noiserock, de prog, d'electro ou de screamo ou sembler être un total OVNI. La seule pertinence qui reste alors est la notion d'originalité contenue dans le sens-même du préfixe post-, ce qui vient après et est donc nouveaux, qui du coup ne peut pas s'affilier à un courant. Au serpent alors de se mordre la queue.

"À force de chercher de bonnes raisons, on en trouve; on les dit; et après on y tient, non pas tant parce qu'elles sont bonnes que pour ne pas se démentir." Laclos.

Sois dans l'après, sois postcannibale !

13 février 2014

La Haine

Fin 2013, Celeste sort Animale(s), son 4e LP. Les lyonnais font alors les choses en grand avec un double album, long, éprouvant et presque sans respiration. Une catharsis totale. Glossaire :

Souffrance, nihilisme, ressentiment, colère, frustration, fatalité, peine, incompréhension, mal-être, bruit, ordure, vice, cynisme, fatalisme, mort, destruction, insulte. Autant de mots qui peuvent illustrer la musique de Celeste autant qu'ils ne sont que des sémantismes vides face au caractère abyssal de ce qu'ils sont sensés désigner et de ce que la musique et les textes du groupe essayent de rendre palpables, au fil d'une discographique aussi dense que monolithique.

La réussite de ce disque tient tout simplement en ce que Celeste parvient à obtenir d'un savant mélange fait de Black Metal, de Screamo et de toutes les musiques les plus extrêmes. Du maelstrom ainsi crée, et qui atteint sans doute pour la première fois sa forme idéale, le groupe réussit l'improbable tour de force de faire naître une sorte de grâce, comme une plénitude noire qui irradie dès les premières notes de "Laissé pour compte comme un bâtard", pour vous avaler au fil de ses 80 minutes dans son vortex sonore aussi virtuose qu'il est sombre et inquiétant.

Si la noirceur et la violence du disque peuvent, au premier abord, sembler repoussantes, elles deviennent vite attirantes, presque magnétiques et cela simplement parce que le propos de cette musique n'est jamais simulé et transpire l'urgence et la nécessité. La musique de Celeste n'est pas un divertissement ou une récréation, c'est un exutoire, assez jusqu’au-boutiste pour en devenir salvateur. Quand au détour d'une phrase musicale née la lumière, ce n'est que pour nous convaincre que tout cela n'est pas vain. Ou est-ce simplement un leurre, une preuve supplémentaire que le pire peut revêtir de la beauté ?

Soigne le mal par le mal et sois cannibale.

22 janvier 2014

Be kind rewind

Un peu comme une tradition, ces dernières années après les fêtes de noël et la saint Sylvestre, le premier rendez-vous musical est la sortie d'un nouveau Mogwai. On retrouve les cinq de Glasgow sur Rave Tapes pour, annonçons-le déjà, ce qui est tout sauf une douche écossaise (oui, bon...).

Ça commence en douceur avec "Heard About You Last Night", sans surprise mais avec beaucoup de plaisir pour un titre dans la continuité de la BO des Revenants. Lenteur et mélodies cotonneuses s'étirent sur 5 minutes parfois appuyé par une discrète nappe de larsen. Terrain connu mais dont la surface herbeuse donne envie de s'allonger pour une sieste rêveuse.
On enchaine alors sur "Simon Ferocious", toujours lent mais fait de sons bien plus saturés. Des vagues de claviers s’entremêlent avec des touches de guitares distordues, puis le morceau progresse vers une boucle mélodique entêtante. Pas ma préférée de l'album mais on n'a pas là non plus de quoi se plaindre.

Arrive ensuite "Remurdered", le premier extrait ayant filtré sur le net. Une intro à la guitare et aux claviers qui annonce le meilleur et qui s'achève par l'apparition d'un roulement de charleston. Montée, gain de puissance, frissons, ça y est on entre véritablement dans l'album. Le morceau continue de s'élever jusqu'à ce qu'on arrive à sa moitié, on est alors en présence d'une fusion entre le son Mogwai et une certaine vision de la musique synthétique. On pense un peu à Zombi, alors on pense à Carpenter. Et je sais pas vous, mais moi, une fois que c'est fait, j'ai un paquet d'images dans la tête et je suis fatalement conquis. Ca marche à tous les coups.

"Hexon Bogon" avec ses deux petites minutes et demi est tout bonnement magique, c'est une leçon musicale simple et merveilleuse. Gros sons, guitares saturées qui se mélangent et répondent à quelques notes de piano. Le voyage continue. Je n'ai pas encore parlé de la batterie, je n'ose peut-être pas le faire tant ces rythmes et ce jeu m'avaient manqué sur les derniers disques. "Repelish" renoue avec la voix parlée si souvent utilisée par le passé. L'ambiance qui s'en dégage est donc particulière, le temps est suspendu sur ce morceau très aérien. On rigole bien à ce qui nous est raconté.

On passe à la deuxième face qui commence de façon originale pour "Master Card" ou le morceau le plus pêchu du LP. On n'est pas très loin du mathrock jusqu'à ce que le morceau s'élève vers autre chose avec l'arrivée de nappes de claviers. Encore une fusion réussi pour un titre qui arrive à être pêchu, mélodique et aérien. Très efficace.

"Deesh" installe une ambiance très sombre et futuriste, une montée de synthés pulsée par un kick de batterie qui se mue progressivement en roulements au fur et à mesure que les synthés se font plus nombreux et puissants. On se fait progressivement avaler par la gueule géante de ce morceau, dans une sorte de rêve mécanique et jubilatoire. La fin impose une batterie presque tribale, inédite chez Mogwai. Encore !!!!

"Blues Hour" est le seul titre chanté du LP. Lenteur extrême et piano pour six minutes vaporeuses et denses, lentement rejoint par des larsens de guitares telluriques, le titre classique-Mogwai du disque mais d'une facture purement excellente ! "No Medicine For Regret" est le seul morceau qui ne me parle pas véritablement, il me faudra sans doute quelques écoutes supplémentaires pour me l'approprier.

On est déjà à la fin d'un album sans faute quand commence "The Lord Is Out Of Control". Le terrain est connu, voix vocodée, boites à rythmes, mais le titre est simplement magnétique et termine en beauté la seconde face d'un excellent cru de Mogwai. Il ne reste plus qu'à retourner le disque et l'écouter encore et encore.

Le groupe sera à l'Olympia le 3 février, et vous ?

L'année commence bien, elle sera cannibale !

6 janvier 2014

Dans la brume électrique

Le premier janvier de cette nouvelle année, en me réveillant, je ne me souvenais plus du tout de ce qui avait bien pu se tramer pendant les douze derniers mois. Avais-je voyager sur Mars ? Rencontré Dieu ? Trouvé la paix intérieure ? Peut-être... J'ai donc décidé de me plonger dans mes disques pour tenter de me remémorer 365 jours et une somme colossale d'heures passées à écouter de la musique. Seul, accompagné, debout, couché, assis, en roulant, en marchant, en mangeant, en fumant, en rigolant, en lisant, en dansant, dans la lumière, l'obscurité ou la rue, chez moi et ailleurs, j'ai passé des milliers d'heures à vivre l'oreille tendue vers un amas de sons, qui mis les uns avec les autres forment cette chose magique et éternelle qu'on nomme musique. Tous ces disques passés en revue m'ont raconté 2013 en faisant naître des images et des sensations. La cuvée fut bonne et laissera quelques disques qu'on réécoutera sûrement longtemps.

Champion toutes catégories : Ventura, Ultima Necat. Disque de l'année et déjà bien placé pour devenir disque de la décennie voire même du siècle. Certains voyants millénaristes parlent même d'une religion basée sur cet LP, qui pourrait selon eux supplanter le catholicisme. Les adjectifs manquent pour décrire la courbe que prennent mes poils quand je fais glisser le diamant sur le sillon de ces deux faces, même près de deux milles écoutes après ce soir béni où j'ai posé pour la première fois ce disque sur une platine. Une révélation d'ordre mystique, un éveil et une profession de foi. Mon chat non plus ne s'en remet pas. Rien de moins.

 J'ai pris 27 autres claques, ce qui fait à peu près une par quinzaine, ce qui n'est pas mal du tout :

Sed Non Satiata, Mappô.
12XU, On largue les amarres.
The Appleseed Cast, Illumination Ritual.
Torino, EP.
Michel Clou Duo, Minuit dans tes bras.
Mendelson, Mendelson.
Year Of No Light, Tocsin.
Celeste, Animale(s)
Cortez, Phoebus.
Deafheaven, Sunbather.
Fuck Buttons, Slow Focus.
Autechre, Exai.
Oneohtrix Point Never, R plus seven.
Body/head, Coming appart.
Mark Kozelek, Like rats.
Polvo, Siberia.
Sebadoh, Defend yourself.
Lee Ranaldo and the Dust, Last night on earth.
Mogwai, Les revenants.
Nick Cave and the Bad Seeds, Push the sky away.
The Bronx, IV.
Tomahawk, Oddfellows.
Pigs, Gaffe.
Pissed Jeans, Honeys.
Sofy Major, Idolize.
Papaye, Tennis.
Zeus!, Opera.

Concerts mémorables :

Deafheaven, Paris, La Flèche d'or.
Big'N, Paris, Espace B.
The Young Gods, Paris, Nouveau Casino.

Bonne année sous le signe du cannibalisme.