30 avril 2013

La mort aux trousses

Une fois n'est pas coutume, je vais vous parler d'un disque que je suis en train d'écouter, en ce moment même, pour la première fois. J'avais effleuré le sujet dans un précèdent post mais voici le moment d'affronter la bête. Le nouveau Clutch est là, il s'appelle Earth Rocker et je ne ferai pas plus durer le suspense : ce disque est génial !

Dès le premier titre, "Earth rocker", on plonge dans un truc tellement gros, groovy et fun qu'il est difficile d'y croire. Il suffit d'une seule écoute pour que ce morceau devienne instantanément votre chanson préférée des quelques premiers mois de 2013. En l'écoutant très fort au casque dans les rues de ma banlieue favorite, je me suis senti immortel et cool, je glissais sur le bitume tel un monstre mécanique sur un circuit de Grand Prix. Tout ici bluffe par sa concision, son sens du rythme parfait et ses riffs qui font mouche. Puis ce refrain si simple et si excitant... Et ce n'est que le premier titre !

On continue comme ça jusqu'au 4e titre, "D.C sound attack!", quand dès le début on se prend dans la gueule cette petite phrase d'harmonica. Je ne saurais décrire tout ce que m'inspire ce titre qui, musicalement, respire le cool. Et quand à mi-chemin débute ce magnifique pont super épuré à base de cloches et de riffs diaboliques, on n'est vraiment pas loin de l'orgasme pure et simple. Comble du bonheur, le texte est un hommage à la scène Hardcore de Washington sans qui, faut-il le rappeler, nous n'écouterions pas la moitié des bons trucs indés sortis des USA depuis 25 ans. Claque !

"Unto the breach" enfonce toujours le clou avec sa rythmique en forme de massue pour finir de convaincre ceux qui ont les oreilles trop sales. Ça va très vite, en trois minutes et demi ça vous explique qui sont les patrons quand on parle de stoner rock simple et efficace. Il faut préciser que la simplicité n'est jamais là comme une marque d'un truc fait à la va-vite mais est plutôt une façon d'aller à l'essentiel. Rien ne semble jamais bâclé mais simplement construit pour directement faire effet. Et si cela marche si bien, si l'effet est si saisissant, n'est-ce pas la preuve du grand talent d'écriture qui jalonne ce LP ?

On arrive à la moitié de l'entrecôte et quoi de mieux pour faire une pause qu'un titre plus posé ? "Gone cold" est la ballade qui arrive à point nommé. Je vous rassure, rien de sirupeux à l'horizon mais seulement un titre calme, aux parties de guitares clin d’œil à la country. Une réussite ! Les cinq derniers morceaux ont aussi de quoi vous plaquer à vos enceintes, particulièrement "Book, saddle & go" et sa musique de reptile en chasse. Les trois quarts d'heure de rêve touchent alors à leur fin sans qu'on n'ait pu s'ennuyer ne serait-ce qu'une seconde tant le disque se fait varié, concis et réussi de bout en bout.

 "L'assommant primitivisme rythmique du Rock : le battement du cœur est amplifié pour que l'homme n'oublie pas une seconde sa marche vers la mort."
Milan Kundera

Si après ça, il te reste encore des dents, sois cannibale.

21 avril 2013

In the mood for love

Chi Cheng est mort. Je fais partie de cette génération bâtarde qui a grandi en écoutant Deftones sur des CD gravés de mauvaise qualité, qui a vu Le Pen au second tour et a fini par voter la fermeture de plein d'usines en croyant voter pour la gauche. C'est la fin d'une époque.

Pour ceux qui ne suivent pas, là-bas au fond, le bassiste ne jouait déjà plus dans le groupe depuis un terrible accident l'ayant plongé dans le coma. Deftones continuait déjà son bonhomme de chemin depuis deux albums, dont le dernier Koy No Yokan dont il sera question aujourd'hui. Sortez une copie double et décrivez moi en 750 mots ce que représente pour vous ce dernier album sorti fin 2012 !

J'ai entendu le son du groupe pour la première fois à douze ans, c'est un élément constitutif de mon environnement sensoriel, tellement ancré dans ma mémoire qu'il m'est difficile de me pencher sur ce nouvel album. Pourtant, je ne suis pas ce qu'on pourrait appeler un fan de Deftones, c'est pour moi un très bon groupe, parmi les meilleurs, mais pas non plus un truc avec lequel je m'endors tous les soirs en pensant à mon premier amour.

Ce qui me surprend toujours quand j'écoute un nouveau disque du groupe pour la première fois, c'est que tout y est terriblement reconnaissable, différent du reste, unique. Et même si cela n'a pas toujours fonctionné par le passé, ici ils réussissent à pousser les cloisons de leur espace identitaire pour y inclure en douceur de nouveaux éléments, de nouvelles façons de faire, tout en restant Deftones et rien que Deftones. Je ne vous parle pas d'une évolution qu'on pourrait comparer avec celle opérée sur White Pony, où là c'était plutôt à coups de masse qu'ils rangeaient leur piaule; mais d'un truc subtil, le peu qu'il faut pour se dire qu'après toutes ces années, ils continuent de progresser et de parfaire leur discographie. Et ça, on ne voit pas ça chez tout le monde, soit les groupes finissent par s'enfoncer dans une formule, soit ils cherchent l'innovation et se plantent en beauté.

Vous l'aurez compris, ce nouveau cru est de la catégorie des bons, de ceux qui surprennent délicatement le palais tout en vous confortant sur le choix du vigneron. De là à se bourrer la gueule avec, il y a quand même un monde. Cela parce que Deftones est un groupe qui est constitutif du décors depuis longtemps, que l'adolescence est derrière nous et que depuis le temps, il n'y a plus le même enjeu à écouter un de leurs bébés. Alors bien sûr, il y a du tube par poignées sur cette galette, il ne faut pas être médisant, écouter "Rosemary"," Tempest" ou" Leathers" est un plaisir chaque fois renouvelé. Mais que voulez-vous, on n'a plus quinze ans, faut payer les factures, faire le ménage et Deftones n'a plus le même impact qu'à l'époque. Non pas qu'ils ne soient plus pertinents, mais comme nous ils vieillissent, simplement.

Fort heureusement, Deftones ont échappé au sort de tous les groupes de Neometal qui ont tous fini par faire de la merde, quand ils n'en faisaient pas déjà dès le début de leur carrière. Ce groupe a toujours eu un truc en plus, le petit rien qui fait toute la différence et les années passant, cela ne s'est que rarement démenti.

En Californie, les meilleurs Tacos sont cannibales.

12 avril 2013

Possession

Ah, voir et revoir Adjani se trancher la gorge et coucher avec un monstre à tentacules... Ce n'est pas dans la grisaille actuelle des salles obscures qu'on verrait cela. Heureusement, la musique est là pour nous nourrir de son actu.

Ventura est revenu en début de mois pour nous refaire le coup du disque parfait avec Ultima Necat, trois ans après We Recruit. Une nouvelle preuve, si besoin était, de la richesse musicale helvète. Des compos plus riches en ambiances que sur le précédent, une atmosphère plus bizarre tout en gardant un son reconnaissable dès le début du disque. Du tout cuit!

2013 sonne le retour à l'excellence pour Clutch qui avec Earth Rocker vient remettre les pendules à l'heure. Le Stoner rock c'est eux. Un disque fun et sans fioriture, visant à l'essentiel : donner le sourire et faire bouger la tête sur du son gras et groove. C'est à servir chaud et très épicé en attendant le retour de l'été.

Papaye nous revient à la fin du mois avec un nouveau pain dans la face, ça s'appelle Tennis et l'artwork est ce que vous verrez de plus chatoyant cette année. Ce super-groupe composé de membres de Pneu, Komandant Cobra et Room 204, soit ce qui se fait de mieux en France en matière de trigonométrie musicale, est encore une fois là pour vous faire rire et danser entre gens de bons goûts. A voir sur Paris avec Fordamage courant mai.

Les infatigables Melvins reviennent pour la trois millième fois dans nos oreilles, encore une fois pour notre plus grand plaisir même si on a souvent frôlé l'overdose. (Certains dans le fond me disent qu'ils l'ont plus que frôlé depuis longtemps). La livraison de cette année est un album de reprises, ça s'appelle Everybody loves sausages (ben tiens) et la tracklist est aussi variée que ses géniteurs sont cramés du bulbe, on y retrouve Queen, Venom, Throbbing Gristle, David Bowie ou encore The Scientists. Rien que ça.

The Dillinger Escape Plan seront de retour mi-mai pour achever les quelques survivants à leur Mathcore technique et fou. Ça s'appelle One of us is the killer et le premier extrait fait dans le classique de chez classique. En espérant que le reste de l'album sera moins bas du front que ce premier titre sans surprise, le groupe nous ayant habitué à plus de folie et de prise de risques. Verdict le 13 mai.

"On n'attache pas son chien avec des saucisses." Proverbe

Si ta mère est possédée par le démon mais ne ressemble pas Adjani, vient te plaindre ici

6 avril 2013

Maciste contre le fantôme

Cela fait un peu trop longtemps que je n'ai pas posté et je m'en excuse aux trois nolifes qui suivent mon blog ainsi qu'à mon chat qui râle en disant que si seulement il n'y avait que ça que je fais à l'arrache ce serait déjà pas mal. Aujourd'hui nous parlerons de cerveaux luminescents et plus précisément de ZEUS!, grand duo foufou made in Italy et de son deuxième rejeton Opéra.

Parfois au détour d'un webzine, sans attendre rien de spécial, on tombe sur son nouveau groupe préféré, on s'endort le soir en l'écoutant en boucle, un sourire béat fixé aux lèvres. Zeus! est de ces groupes qui font rigoler quand on lit la liste des morceaux de leurs albums, qui donnent parfois mal au crâne quand on n'est pas bien réveillé mais dont la musique et ses structures folles donnent envie de partir en voyage sur un vaisseau spatiale fantôme, avec une bonne réserve de pâtes et de mauvais vin.

Hurlements possédés, sifflements de l'outre-espace, Metal balkanique et Funk à chiens sont au programme pour une traversée chaotique de l'Histoire de la musique vu par le dieu grec. Il revient, pas content, pour vous donner une leçon de solfège assis sur l'arbre de la connaissance, tapant sur vos vertèbres d'une main et de l'autre éclatant joyeusement la tronche d’Orphée, aidé en cela par un saxophone rouillé. C'est un opéra my dear, et comme il se doit c'est tragique et sanglant. Écoute "Beelzebulb" et "Eroica" et tu comprendras ce qu'il en coûte de réveiller la bête.

En écoutant l'album pour la 112e fois en huit jours, il me revient à l'esprit une scène d'un vieux film dans lequel un crétin ivre se fait casser les dents par un gros tout en muscles noueux, il garde un sourire tout du long, la bouche de plus en plus liquide. C'est ça ZEUS!, ça fait mal et c'est rigolo, c'est compliqué mais ludique, ça ne ressemble à rien mais c'est un peu ce que tu as attendu toute ta vie. Dans une autre dimension spatio-temporelle, ils gouvernent l'Italie et Berlusconi est patron d'une société qui synthétise des drogues à prendre après l'amour, pas mal, mais dans cet univers parallèle, de l'autre côté de la frontière, Hollande est président et Sardou respire encore. Ah non merde ça c'est la réalité. Putain de réalité.

Pour oublier la grisaille ambiante, le froid d'un mois d'avril qui rêve de fêter noël et la connerie comme étendard dans certaines manifs parisiennes, enfile tes oreilles, mets le son très fort, ouvre tes fenêtres et célèbre le retour des dieux grecs. Ils viennent faire une bacchanale sur les Champs-Élysées et envahir le Vatican. Habemus fun!

"Le tonnerre est impressionnant, mais c'est l'éclair qui est important." Mark Twain.

Bouffe des pâtes mais n'oublie pas d'être cannibale