3 octobre 2016

Rectify

Étonnement, il aura fallu une série pour sortir Le Mange-disque cannibale de sa torpeur. Je m'excuse d'ailleurs platement auprès des deux personnes qui ne peuvent pas vivre sans  le Mange-disque, l'attente a été difficile et la cellule psychologique a coûté cher mais cela en valait la peine. Il fallait donc absolument que je revienne pour vous parler de Rectify, tout simplement la meilleure série de tous les temps et, comme toujours, je pèse mes mots.
Rectify, c'est l'histoire d'un type que vous allez à aimer, qui va vous toucher comme peu de héros de série ont pu le faire. Daniel Holden s'approche de la quarantaine, il vient de sortir de prison après une vingtaine d'années passées dans les couloirs de la mort. A 18 ans, il a été condamné à mort pour le viol et le meurtre d'une jeune fille. Il sort mais n'est pas tout à fait innocenté. Son retour dans la ville de son enfance, une bonne vieille bourgade ricaine remplie de cons, ne plait définitivement pas à tout le monde. Il y retrouve sa famille qui s'est battue pendant son absence pour le faire libérer. Il y retrouve aussi sa bande d'amis de l'époque, tous présents le soir du meurtre. Ambiance, nœuds narratifs, nous sommes prêts à nous laisser plonger dans une histoire aussi belle que compliquée.
Daniel Holden est donc encore une sorte d'enfant quand il sort de prison, le monde a changé pendant son absence et même si il a l'aspect extérieur d'un adulte d'une certaine maturité, ses réactions face à son environnement sont celles de quelqu'un qui découvre tout après avoir passé vingt ans dans une boite. Une des grandes forces de la série réside dans la manière particulière qui est la sienne de nous montrer comment Daniel se confronte au monde. De le voir tenter de redevenir quelqu'un, une personne à part entière avec un champs de vision sans mur ni barreau, est une chose terriblement forte et qui, tout au long des trois saisons de la série, porte l'histoire en lui donnant un ton dramatique à fleur de peau. Daniel Holden est filmé comme un mystique qui sort de deux décennies loin du monde, chaque petit détail du quotidien est alors pour lui autant une bénédiction qu'une blessure qu'il accueille avec une sensibilité exacerbée.
Au-delà de ça, la série nous parle de comment un groupe de personnes réagit face à l'intrus, à la différence et à un drame qui a secoué leur petite ville de façon frontale. Son autre grande réussite réside dans des dialogues et une mise en scène très dépouillés, qui collent aux failles de chacun de ses personnages. Il y a dans Rectify les scènes de disputes les plus poignantes que vous pourriez voir dans une série et, malgré ça, elles sont d'une justesse qui fait trembler. L'économie de mots y fait penser aux nouvelles de Raymond Carver, tant ceux qui ne sont jamais prononcés sont présents derrières les corps, les fait peser et nourrissent la tension dramatique d'une façon aussi belle que terriblement dure et difficile.
Avec tout cela, Rectify devient une série un peu hors normes, qui avance très doucement et ne se prive jamais de nous questionner et de nous mettre mal à l'aise. Daniel Holden est un héros aussi attachant qu'il peut être dérangeant et, à travers lui, la série nous parle de liberté, des difficultés et du poids du groupe, de la faiblesse de la justice et de toutes ces petites choses qui sont autour de nous, qu'on ne regarde plus et qui sont pourtant la preuve du simple fait que nous sommes vivants. La meilleur série de tous les temps, je vous dis.
Profite de la fin de l'été et sois cannibale.

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